Traité conclu, le 3 juin 1890 avec le roi du Djoloff
Entre nous, Alfred Dodds, colonel commandant supérieur des troupes, commandant la colonne expéditionnaire du Djoloff, officier de la Légion d’honneur, agissant comme représentant de M. Clément Thomas, gouverneur du Sénégal et dépendances, chevalier de la Légion d’honneur, et en vertu des pouvoirs qui nous ont été confiés, d’une part ; Et Samba Laobé Penda Sangoulé N’Diaye, assisté de ses principaux notables, d’autre part,
A été conclu le traité suivant :
Art. 1. — Le royaume du Djoloff est placé sous le protectorat et la suzeraineté de la France. Il est gouverné par un roi qui continue à prendre le litre de Bour-Ba. La transmission du pouvoir se fera sur la présentation, par les notables, d’un candidat choisi parmi les membres de la famille appelés à régner. Le gouverneur se réserve le droit absolu d’agréer ou de repousser dans le cas où il serait hostile à des idées de justice et de progrès qui doivent animer tous les princes et les chefs alliés de la France.
Art. 2, — L’élection de Samba Laobé Penda Sangoulé N’Diaye, choisi librement pour exercer le pouvoir par les notables assemblés à Yang-Yang, le 29 mai 1890, est ratifiée par le gouverneur du Sénégal qui reconnaît Samba Laobé Penda comme roi du Djoloff.
Art. 3. — Il n’est rien changé aux mœurs, coutumes et institutions du pays. Le Bourba Djoloff réglera toutes les affaires intérieures de son royaume d’après les lois en vigueur. Tous les différends entre indigènes continueront à être jugés par leurs chefs d’après les conventions du pays.
Mais si un différend civil ou commercial s’élève entre un indigène et un sujet français, il sera jugé en première instance par le Bourba Djoloff et en appel par le gouverneur dont la décision annulera ou confirmera, s’il y a lieu, le précédent jugement.
Art. 4.— Les conflits entre le Joloff et l’un quelconque des royaumes ou pays voisins seront toujours soumis à l’examen du gouverneur du Sénégal, qui seul en décidera.
Art. 3. — Le Bourba Djoloff ainsi que ses Diambours prennent rengagement d’administrer leur pays avec justice, de favoriser l’agriculture, de ne pas exiger des cultivateurs des redevances exagérées, de protéger les gens paisibles qui vivent de leur travail. Non seulement le Bourba Djoloff s’engage à empêcher qui que ce soit, prince ou chefs, de piller les villages, mais encore il veillera à la reconstruction de ceux qui ont été détruits et à rétablissement de nouveaux centres de population. Il protégera partout où ils s’établiront les négociants et traitants français qui pourront toujours commercer librement dans le pays ; enfin il fera tout son possible pour assurer et augmenter la prospérité du Djoloff.
De son côté, le gouverneur du Sénégal, en témoignage de la bienveillance dont il est animé envers le Bourba Djoloff, l’autorise à placer dans les lieux de traite qui se fonderont dans l’intérieur de son royaume des alcatys qui percevront sur les produits du sol et les bestiaux un droit à déterminer, mais qui, dans aucun cas, ne pourra être supérieur aux droits perçus, pour les mêmes denrées, dans les pays alliés ou protégés.
Art. 6. — Nul ne pourra s’établir dans le Djoloff sans l’autorisation du gouverneur. Le Bourba Djoloff ne donnera jamais asile, aide ou appui aux gens qui lui seront signalés par le gouverneur comme coupables de crimes ou de délits de droit commun, ennemis de la paix publique ou ad-
versaires de la France. Par suite de cet arrangement souscrit par le Bourba, le territoire de Djoloff est interdit à Aly Boury et aux aventuriers du Djoloff et des pays voisins qui l’ont aidé dans ses déprédations et forment sa garde particulière.
Art. 7. — Aucune troupe étrangère en armes ne devra, sans l’autorisation du gouverneur, traverser le territoire de Djoloff pour porter la guerre dans un autre point de la Sénégambie.
Aucune expédition ne pourra être préparée ou engagée sous quelque prétexte que ce soit, par le Bourba Djoloff sans l’assentiment du gouverneur. Dans le cas où cet assentiment serait accordé, le gouverneur, s’il en était besoin, viendrait en aide au Bourba. Par réciprocité, le Bourba Djoloff s’engage, s’il en est requis, à mettre ses contingents à la disposition du gouverneur qu’ils devront suivre partout où besoin sera et servir comme loyaux et fidèles alliés .
Fait à Yang-Yang, le 3 juin 1890. A. Dos. Samba Laobé Pend a Sangoulé N’Diaye. (Signatures des témoins). Approuvé : Le gouverneur du Sénégal et dépendances Clément Thomas.