C’est à la fin de mai que se fait la récolte du mil ; alors les marabouts reçoivent du grain de leurs esclaves ; et les hassanes, de leurs zénagues ou tributaires. Ce mil les soutient jusqu’au mois de juillet, époque où commence la saison pluvieuse, et où ils s’éloignent des bords du fleuve, pour ne plus vivre que de lait ; alors ceux qui ont du mil de reste, le conservent pour le retour de la sécheresse.
Au mois de novembre, quand les eaux du fleuve commencent à baisser, les Maures envoient leurs esclaves ensemencer les terres qui ont été submergées par les pluies ou par le débordement du fleuve. C’est aussi à cette époque que les zénagues se rendent près du fleuve pour y cultiver le mil. Les esclaves d’un même camp se réunissent pour le logement, et établissent leurs cultures dans le même canton; chaque champ est limité, et la récolte de chacun gardée soigneusement à part. La manière dont ils cultivent est extrêmement vicieuse; mais elle leur donne peu de peine. Ils ont un grand piquet avec lequel ils font des trous de six pouces de profondeur; ils mettent trois ou quatre grains de mil dans chaque trou, puis le recouvrent d’un peu de sable ou de terre légère. Ils ne donnent aucune préparation à leurs terres ; seulement ils sarclent l’herbe après que le mil est levé. Pour éviter le travail, ils choisissent un sol maigre, parce que le sol gras, produisant plus d’herbes, les obligerait à un sarclage de plus, et qu’ils sont naturellement enclins à la paresse. Quand leurs champs sont ensemencés, ils attendent en repos que le mil soit levé ; alors ils l’éclaircissent et nettoient autour du pied, pour lui donner de l’air; beaucoup n’y font rien de plus, et laissent croître l’herbe entre les rangs.
Quand l’épi commence à paraître, ils se tiennent continuellement dans le champ, pour en chasser les oiseaux, qui dévoreraient le grain avant sa maturité : cette occupation ne leur laisse pas un moment de repos ; ils vont sans cesse d’un bout du champ à l’autre, en criant, jetant des pierres, et la nuit ils y couchent pour veiller aux gazelles, aux porcépies et aux sangliers, qui leur feraient de grands dégâts.
Lorsque le mil a atteint sa maturité, on coupe l’épi, on l’égrenne en frappant dessus avec des bâtons. Le grain est mis dans des sacs de cuir et transporté dans les camps; ceux qui en récoltent au-delà de leur consommation probable, portent l’excédant aux escales et le vendent aux traitans.