Le camp avait encore changé de place ; il était reculé d’un mille à l’E. et se trouvait près d’un ruisseau nommé Rekiza. A notre arrivée, on nous apprit que Hamet-Dou faisait la guerre aux Oulad-Hamet, et que ceux-ci prenaient la fuite pour éviter leurs ennemis, auxquels ils étaient de beaucoup inférieurs.
Voici le sujet de cette guerre.
Les esclaves Haratines de la tribu de Oulad Hamet avaient cherché querelle à ceux du roi, et avaient ravagé leurs champs de mil; ceux-ci s’en plaignirent à leur maître, qui alla avec ses gens prendre les troupeaux des Oulad Hamet pour leur faire payer le dégât commis sur ses terres. Toutes les femmes de la tribu vinrent implorer la clémence du roi, qui rendit les troupeaux sans exiger aucune indemnité. Mais ces perfides, loin d’être touchés de la bonté du prince, attaquèrent de nouveau les gens d’Hamet Dou, les surprirent dans leurs tentes, et en tuèrent quatre ; ils éprouvèrent cependant une vigoureuse résistance, car ils se retirèrent avec une perte de sept hommes, que les assaillis leur tuèrent. Cette conduite atroce excita la colère du roi ; il jura de s’en venger et déclara la guerre à toute la tribu. Les agresseurs, sachant qu’il n’y aurait rien à gagner pour eux dans cette guerre, entrèrent en négociation, et le roi leur pardonna de nouveau.
La tribu des Oulad Hamet est de celles des Braknas la plus perfide ; ils ne respectent rien, pas même leurs compatriotes. Lorsqu’ils rencontrent des voyageurs, ils les dévalisent s’ils sont les plus forts; et si le hasard conduit ces derniers dans leurs camps, ils n’en sortent pas sans être dépouillés de tout ce qu’ils possèdent: aussi a-t-on soin de les éviter soigneusement. Leur caractère atroce les fait détester de toutes les autres tribus ; on ne parle d’eux qu’avec une espèce d’horreur.
Le même jour on vint dire que les Trarzas venaient de voler des bœufs dans les bois, et qu’ils les emmenaient : on fut fort embarrassé ; il ne se trouvait que peu d’hommes dans le camp, car tous avaient pris la fuite à l’approche du ramadan; il ne s’en présenta que sept ou huit pour courir après les voleurs. Je remarquai qu’ils n’avaient pas de fusils; mais on m’assura que les hassanes -trarzas ne se serviraient pas des leurs, et qu’on ne se battrait qu’à coups de bâton. Pendant leur absence, toutes les femmes se réunirent par groupes, et discutèrent sur le résultat qu’aurait cette affaire; plusieurs querelles s’élevèrent entre elles, car les unes prétendaient que les Trarzas emmèneraient les bœufs, tandis que d’autres soutenaient au contraire qu’ils auraient le dessous, et que les marabouts leur feraient lâcher prise. Vers la lin du jour, les dilférens furent réglés, les marabouts revinrent, et dirent que les voleurs avaient pris la fuite à leur approche, et avaient abandonné les bœufs.