J’ai déjà dit que les femmes mauresses ont beaucoup d’ascendant sur leurs maris; je le répète ici, pour détruire une erreur dans laquelle M. Durand est tombé, et qu’il a pu transmettre à ses lecteurs. Le mari n’a d’autre autorité sur sa femme que celle que lui donne une raison plus éclairée; je dirai même que les Mauresses conservent plus d’empire sur leurs maris que nos dames françaises. Rarement elles les servent; il faudrait qu’elles n’eussent pas d’esclaves; et encore j’ai toujours vu que, dans ce cas, une voisine prêtait une femme pour piler le mil et faire le sanglé. J’excepte les femmes zénagues; mais si celles-ci servent leurs maris, c’est quand leurs esclaves sont occupées, et d’ailleurs elles travaillent ordinairement. M. Durand dit encore que les femmes ne sont jamais admises aux repas de leurs époux : j’ai été témoin du contraire; je les ai vues manger avec leurs fils et leur mari; rarement, à la vérité, mais j’ai remarqué que cela dépendait de l’usage qu’ont les femmes de ne boire que du lait, qu’on leur sert dans de petites calebasses.
Il est encore inexact de prétendre que la mère porte respect à son fils, et que le père et la mère affectent de l’indifférence pour leurs filles : le fils est toujours soumis à sa mère et l’honore infiniment ; et si les parens ont quelque préférence pour les garçons, ils n’en chérissent pas moins leurs filles. D’ailleurs, je n’ai jamais vu de réjouissances, ni à la naissance d’un garçon, ni à celle d’une fille.