La lune, par ses changements de forme, a un peu plus attiré leur attention. A la première apparition d’une nouvelle lune, qu’ils supposent être nouvellement créée, les naturels soit païens, soit mahométans, disent une courte prière. Ce semble être le seul culte que les païens rendent à l’Etre suprême.
Cette prière se prononce tout bas ; chacun tient ses mains devant son visage. La prière a pour objet, m’ont assuré diverses personnes, de rendre grâces à Dieu des bontés qu’il a eues pendant la lune passée, et de lui en demander la continuation pour la durée de celle qui commence. Quand ils ont fini de prier, ils crachent dans leurs mains, et s’en frottent le visage. Ce paraît être à peu près la même cérémonie qui se pratiquait chez les païens du temps de Job. (Chap. xxi., vers. 26, 27, 28.)
On fait aussi grande attention aux changements qu’éprouve cet astre pendant sa révolution, et l’on regarde comme une chose très fâcheuse de commencer un voyage ou toute autre opération importante dans le dernier quartier de la lune. Une éclipse, soit de lune, soit de soleil, est attribuée à la sorcellerie.
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Quelques opinions religieuses des Nègres, quoique mêlées de superstition et dictées par une crédulité ridicule, ne sont pas indignes d’attention. J’ai conversé avec des hommes de toutes les classes au sujet de leur foi, et je n’hésite pas à prononcer que la croyance d’un Dieu, ainsi que celle d’un Etat futur de peines et de récompenses, est universelle chez eux. Il est cependant à remarquer qu’excepté lors de la nouvelle lune et des cérémonies qu’elle occasionne les naturels païens croient inutile d’offrir au Tout-Puissant aucune prière ni supplications. Ils parlent de Dieu comme du créateur et du conservateur de toutes choses, mais ils le regardent comme un être si éloigné de nous et d’une si haute nature qu’il y a de la folie à supposer que les importunités des faibles mortels puissent changer les décrets ou renverser les lois de son infaillible sagesse. Si on leur demande pourquoi donc ils font des prières lorsqu’ils voient la nouvelle lune, ils répondent que l’usage en a fait une loi, et qu’ils le font parce que leurs pères l’on fait avant eux. Tel est l’aveuglement de l’homme que n’a point éclairé la lumière de la révélation !
Les Nègres supposent que le Tout-Puissant a confié les affaires de ce monde aux soins et à la direction d’esprits subordonnés, sur lesquels ils croient que les cérémonies magiques ont une grande influence. Un oiseau blanc suspendu à la branche d’un certain arbre, une tête de serpent, quelques poignées de fruits, sont des offrandes qu’emploient souvent la superstition et l’ignorance pour conjurer la colère ou se concilier la bienveillance de ces agents tutélaires. Au reste, il arrive rarement que les Nègres fassent de leurs opinions religieuses un sujet de conversation. Lorsqu’on les interroge en particulier sur leurs idées d’une vie future, ils s’en expriment avec un grand respect, mais ils tâchent d’abréger la discussion en disant mo o mo inta allo (personne ne sait rien là-dessus). Ils se contentent, disent-ils, de suivre dans les diverses occasions de la vie les leçons et les exemples de leurs ancêtres, et lorsque ce monde ne leur offre ni jouissances ni consolations ils tournent des regards inquiets vers un autre, qu’ils supposent devoir être mieux assorti à leur nature, mais sur lequel ils ne se permettent ni dissertations ni vaines conjectures.
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Lorsqu’il meurt un personnage important, les parents et amis se réunissent et manifestent leur chagrin par de grands et lugubres cris. On tue un bœuf ou une chèvre pour les personnes qui viennent assister aux funérailles. La cérémonie a lieu, en général, le soir du jour même de la mort. Les Nègres n’ont point de lieu de sépulture déterminé ; souvent ils creusent la fosse dans le sol même de la hutte du défunt, ou sous quelque arbre qu’il affectionnait. Le corps est vêtu de coton blanc et enveloppé dans une natte. Il est porté au tombeau, à l’entrée de la nuit, par les parents. Si la fosse est hors de l’enceinte de la ville, on met dessus des branches épineuses, pour empêcher les loups de déterrer le corps, mais je n’ai jamais remarqué que l’on couvrît le tombeau d’aucune pierre destinée à servir de monument ou a décoration.