37. – HISTOIRE DE HORMIZDAD
Ḫosrō Anoširwan mourut après un règne de 47 ans. Hormizdad,qui succéda dans l’empire persan, se montra très favorable aux chrétiens.
Les mazdéens, ne pouvant supporter cela, s’en plaignirent. Le roi, pour leur faire comprendre que l’empire ne pourrait s’appuyer sur les mazdéens seuls, leur cita ce proverbe : « De même qu’un trône, qui a quatre pieds, ne peut se tenir sur ses deux pieds de devant, s’il ne s’appuie également sur les deux de derrière, ainsi la religion des mazdéens ne pourra se tenir, s’il n’y a pas une autre religion, qui lui soit opposée. Prenez garde, prenez garde de contrarier les ordonnances que j’ai faites pour la protection des chrétiens, pour la conservation de leurs lois et pour la pratique de leurs usages ; car ils sont fidèles et obéissants. Hormizdad honorait beaucoup le catholicos Ézéchiel. Anoširwan l’avait désigné pour son successeur, comme déjà son père Qabâd avait fait pour lui. Il fut couronné après la mort de son père, dans les jours appelés Pirozdejan, dans un pyrée à Goundi-Sabor. Ses frères l’honorèrent de leur estime. Que Dieu lui fasse miséricorde.
38. DÉTAILS SUR LA MORT DE ḪOSRŌ ANOŠIRWAN ; FAITS QUI EURENTLIEU DANS L’EMPIRE ROMAIN AVANT, DURANT ET APRÈS CETTE EPOQUE
La guerre continua entre les Romains et les Perses. Anoširwan, trois jours après la prise et la destruction de Dara, envahit la terre romaine.
Ayant appris que les Romains venaient de ruiner dans les environs de Mossoul et de Ba-‘Arabāyā un espace de plus de 50 parasanges, il s’irrita beaucoup ; et, ayant rassemblé ses armées, il attaqua Raqqa, qu’il détruisit avec les villages d’alentour ; il ruina aussi Césarée et la pilla.
Les Romains, qui l’atteignirent, lui coupèrent les routes ; et, l’ayant environné de tous côtés, ils allaient le saisir, quand, grâce à un stratagème qu’il employa, il put leur échapper et traverser l’Euphrate à la nage avec une grande partie de ses armées ; la plupart de ses soldats se noyèrent avec leurs bêtes ; les autres, qui s’échappèrent nus, furent poursuivis par les Romains, qui en massacrèrent un grand nombre. Ils s’emparèrent aussi du pyrée que le roi avait apporté avec lui et dans lequel il avait mis tous ses trésors ; ils y massacrèrent 60 officiers et éteignirent le feu en versant de l’eau sur lui.
Ḫosrō abandonna tout confus le territoire romain ; le chagrin le fit tomber dans une maladie de poitrine, qui l’emporta enfin au bout de 40 mois. Les Romains d’Antioche, qu’il avait conduits en captivité et fait habiter dans la ville qu’il leur avait bâtie, se réunirent pour honorer ses restes, selon l’usage des chrétiens, tenant à la main des encensoirs et des cierges, et les entourant tout le long du chemin jusqu’au lieu où ils furent déposés.
Il régna 47 ans et quelques mois. On a de lui des maximes et des proverbes qu’on cite toujours. On raconte qu’Anoširwan vit des signes mauvais et qu’il eut des apparitions étonnantes. Un jour qu’il s’était assis sur son trône, ayant la couronne sur la tête, voici qu’un gros chien se tint en sa présence, puis disparut. Les portiers et les chambellans, qui furent punis pour cela, dirent qu’ils ne savaient point comment cela avait eu lieu. On raconte aussi qu’il vit une autre fois un homme au visage très hideux et habillé en haillons s’approcher de son trône, y monter et s’asseoir à côté de lui ; il ne put savoir comment il y était arrivé. Il y en a qui disent que cela eut lieu du temps de son père.
39. HISTOIRE DE DANIEL, LE PÉNITENT.
Sous le catholicos Ézéchiel (567-9-575) vivaient : Daniel le pénitent, qui opéra des prodiges et des miracles, et qui fonda sur la route royale, dans un endroit difficile, appelé Besloy, un monastère, où il réunit des écoliers ; Abimélek, qui bâtit un couvent à la porte de Nisibe ; et Siméon qui fonda un monastère dans la montagne d’Arokh. Barsahdé a inséré leur histoire dans son livre.
40. Histoire de Rabban Qūsrē
Ce saint était originaire de Ninive et vivait du temps de Ḫosrō Anoširwan et de son fils Hormizdad. Dès son enfance il s’attacha à la lecture des Livres divins. Étant devenu, adolescent, il alla trouver Rabban Job, disciple d’Abraham de Nethpar, qui lui donna l’habit monastique, et auprès duquel il passa 15 ans, en servant les frères, ne se nourrissant que de pain et d’eau ; une chemise sans manches lui servait de vêtement ; il convertit à la vraie foi une foule de Jacobites qui habitaient Ninive, et opéra biendes miracles.
On en raconte qu’un jour, lorsqu’il passait auprès de bergers qui mangeaient de la viande, ceux-ci le prièrent et le conjurèrent de manger avec eux ; il consentit à cause du serment et avala trois bouchées : Les moines qui étaient avec lui, désapprouvèrent sa conduite et conçurent pour lui du mépris. Il fallait traverser (le Tigre), pour aller de Ninive jusqu’au jardin. Il fit le signe de la croix sur l’eau, s’assit sur son vêtemént qu’il venait d’étendre (sur l’eau), et après avoir pris à côté de lui les moines, qui l’avaient blâmé de ce qu’il avait mangé de la viande, passa l’eau avec eux comme à pied sec. Les gardes de la porte de la ville, l’ayant aperçu, le prirent pour un dieu.
Puis il bâtit tout près de la ville un grand temple, où deux moines pieux vinrent habiter avec lui. Il n’y avait point alors de bâtiments vis-à-vis du jardin.
Ce fut Ḫosrō b. Hormizd, qui, à son avènement, bâtit alentour beaucoup de bâtiments, où on logea.
Lors de l’invasion des Arabes dans le pays, d’où ils conduisaient les hommes en captivité, beaucoup degens se réfugièrent dans le voisinage du saint. Les Arabes les attaquèrent et les firent prisonniers. Un d’entre eux, qui tira le sabre pour tuer lesaint, eut la main glacée. Ayant été guéri par le saint, qui, à ses instances,venait de prier sur lui, il fut la cause que tous les prisonniers et tout le butin lui furent livrés.
Il prédit la fondation de Mossoul et sa gloireet la fin de la domination (persane).
Quand les Arabes régnèrent, ils ajoutèrent de nombreux bâtiments, àl’endroit où Ḫosrō avait bâti, et le nommèrent Mossoul (ex-Ḥasnā ‘Abrayā), qui devint ensuiteune ville.
On dit que ce saint ne se nourrissait pendant le carême que de fruits. Il mourut vieux et fut inhumé dans son couvent, qui est connu sous le nom deRabban Qousré : c’est encore aujourd’hui le siège des métropolitains de Mossoul
41. Histoire de Tibère, roi des Romains
Cet homme régna en 885 d’Alexandre (574) ; il favorisa les pauvres, défendit la croyance a la dualite de natures dans le Christ et chassa les heretiques.
De son temps la paix fut rompue avec les Perses, à cause des Arméniens, qui
se révoltèrent contre ceux-ci et implorèrent la protection des Romains. Dieu fit triompher le Roi des Perses et des autres ennemis. Les Perses envahirent ensuite Rēš ‘Aynā et les environs de Nisibe. Ils devastèrent tout le pays et emmenèrent les habitants en captivité. Tibère envoya contre eux Maurice, le chef de ses armées ; il fit 70 000 prisonniers et les envoya dans l’île de Chypre. Il repoussa encore les Perses, qui avaient repris l’offensive et envahi les régions de la Cilicie.
Tibère, s’étant rendu compte du mérite et de la bravoure de Maurice, lui donna sa fille en mariage, et, n’ayant pas de fils pour le remplacer sur le trône, il le désigna pour son successeur. Il mourut après un règne de 9 ans, dont 5 ans avec Justin et 4 ans après lui.
42. Histoire de Išō‘-Yab d’Arzun, 30ème Catholicos
Cet homme etait originaire de Beyt ‘Arabāyā ; il était érudit et vertueux ; il avait une taille parfaite et un beau visage ; il avait fait ses études à Nisibe chez Abraham l’interprète, auquel il avait ensuite succédé dans la chaire d’interprétation, puis il fut choisi et consacré évêque d’Arzun.
Le roi Hormizd le connaissait et l’aimait ; car c’était lui qui le renseignait sur les mouvements des armées romaines.
Apres la mort d’Ezechiel le catholicos, quelques-uns de ceux qui s’étaient réunis pour choisir un catholicos, élurent Job l’interprète de Séleucie et le parent de Mar Narsay ; les autres choisirent Išō‘-Yab évêque d’Arzun.
Le roi, à qui on venait de rendre compte de la situation, ordonna que l’évêque d’Arzun fut consacré catholicos ; et s’étant enquis de la façon dont il devait être consacré, on lui répondit qu’il était nécessaire de convoquer les évêques et les métropolitains. Il les fit donc appeler et leur imposa de consacrer Išō‘-Yab patriarche.
Celui-ci, accompagné des évêques, se présenta devant le roi, auquel ils rendirent grâces, et qui les renvoya a leurs sièges comblés d’honneur.
Il écrivit même aux gouverneurs d’agir d’après l’avis des évêques dans les questions de droit et dans les autres affaires et de ne rien faire si ce n’est suivant leurs conseils. Les mazdéens s’irritèrent de ce que plus que tous les rois persans il honorait les chrétiens.
En la quatrième année de son pontificat, il composa pour Jacques, évêque de de Dīrīn, 22 canons, qui contenaient ce dont il avait besoin pour l’administration de son diocèse. Il expliqua en abrégé les saints mystères.
Nisibe et ‘Āna étaient deux villes limitrophes des Romains et des Persans.
Kosraw Parwez attaqua son père Hormizd, lui creva les yeux, et, grâce aux soldats, s’empara de l’Empire. Mais après sa victoire et la proclamation de son avènement, il fut contraint de fuir devant Bahram, le commandant des armées, et d’avoir recours au Roi des Romains, qui lui donna des troupes et le rendit maitre de l’Empire, comme nous en parlerons en détail.
Comme à son retour triomphal’ on lui dressait des tentes, le catholicos Isō‘ Yahb lui dressa lui aussi 3 tentes, devant lesquelles il se tint, prêt à le saluer. Mais le roi se montra fâché contre le catholicos et ne voulut pas le regarder. Sur son ordre les évêques tenaient dans les mains du musc recherché, de l’ambre exquis, du camphre, du safran, des bois d’aloès des Indes et des cassolettes ; le roi n’entra pas sous la première tente. Le catholicos, qui tenait à la main du myrte, un cédrat et une cassolette, s’empressa de se rendre à la deuxième tente. Le roi ne voulut pas y entrer. Le catholicos était dans la perplexité ; les soldats de Maurice commençaient à murmurer à la vue de ce manque d’égards. Le roi, qui s’en aperçut, dit alors au catholicos : « Tu as fait trois mauvaises actions, dont il faut te punir. Premièrement tu n’es pas venu avec moi en terre grecque ; tu n’ as même pas envoyé un évêque pour m’accompagner. L’roi Maurice m’aurait beaucoup plus honoré. Tu n’es pas même venu me rejoindre dans le pays des Romains, où tu savais bien que j’étais arrivé et reçu par Maurice. Deuxièmement tu ne m’as pas dressé une tente comme il fallait.
Enfin tu as prié pour l’usurpateur Bahram. » Puis le roi se dirigea vers la troisième tente et il y entra. On tint sa monture par la bride. Lorsqu’il fut sous la tente, il s’adressa au catholicos et lui dit avec colère :
« Penses-tu que tu pourras échapper par la ruse que tu viens d’employer à la punition dont tes crimes t’ont rendu digne ? Ou bien crois-tu que j’ai ignoré que tu as étendu les mains pour prier pour Bahram, qui s’était révolté contre moi ? Je n’ai prié, lui répondit-il, que pour le roi. J’ai souhaité que les hommes échappassent à la tyrannie de ce méchant esclave.
– Je suis entré, lui dit-il, sous ta tente et j’ai agréé tes compliments ; et, pour répondre aux trois questions que je t’ai posées, je te donne trois jours de délai. »
Puis il étendit la main, prit le cédrat des mains du catholicos, qui pria beaucoup pour lui, et il continua sa route.
Au bout de trois jours, il lui demanda quelle était sa défense sur les trois crimes qui l’avaient courroucé. « Ce qui m’a empêché, lui répondit-il, de t’accompagner, c’est que tu es parti pendant la nuit sans que je m’en aperçusse ; d’ailleurs, le jeûne aurait empêché ma suite de m’accompagner dans ce voyage ; et j’ai redouté de voir l’effusion du sang de mes coreligionnaires.
C’est encore la même cause qui m’a empêché ensuite de rejoindre le roi en terre grecque, parce que si j’avais quitté mon troupeau, l’adversaire rebelle l’aurait su et aurait versé le sang des petits aussi bien que celui des grands.
Or mon devoir est de le sauver en lui donnant ma vie, et non pas de me sauver tandis qu’il est menacé de périr. Enfin, Dieu, qui connaît les intentions et qui sonde les coeurs, m’est témoin que je n’ai prié que pour le roi ; j’ai prié pour la conservation et la sécurité du roi et pour l’affermissement de son pouvoir. Comment me serais-je permis de prier pour celui que je connaissais pour rebelle à son maître ? La prière que je faisais, je l’offrais dans mon coeur pour celui qui était digne d’être appelé roi.— J’ai accepté, lui répondit le roi, tes excuses, et j’ai rejeté les desseins que j’avais imaginés contre toi. »
Les Romains étaient mécontents de lui parce que, quand il était évêque d’Arzun, il renseignait le roi Hormizd sur leurs mouvements. Išō‘ Yahb tomba malade et mourut en la cinquième année de Kosrō Parwez (595).
Hind bt. An-Nu‘mân b. al-Mundhir, roi des Arabes, l’inhuma dansl’église qu’elle avait construite à Ḥīra, dans le milieu du choeur, où on élevasur son tombeau un baric en forme de croix. Cette église est connue aujourd’hui sous le nom de Dayr Hind. Son pontificat dura 14 anssuivant les uns, 15 ans suivant les autres.
43. — RÉSUMÉ DE CE QUI ARRIVA A HORMIZD PAR SON FILSKOSRO ET LA CAUSE DE CES ÉVÉNEMENTS D’APRÈS LES ANNALES ROYALES.
Hormizd avait envoyé le commandant de ses armées Bahram Sobin (Djôbîn) pour combattre les Turcs ; il en avait triomphé et avait envoyé un riche butin à Hormizd, qui honora fort le triomphateur. Mais les courtisans jaloux le desservirent auprès de lui en disant que le butin envoyé était bien médiocre à l’égard de celui qu’il avait pris pour lui-même. Or le roi, en récompense de tant de services, lui envoya une chemise rouge et un fuseau muni de la boule qui le termine :
« Un homme comme toi, lui fit-il dire, ne doit avoir qu’un pareil accoutrement. »
Cela mit l’armée en colère et la porta à se révolter contre le roi Hormizd. Bahram, ayant reçu l’ordre du roi de se présenter devant lui, se mit en révolte et partit pour Ray où il fit frapper des
pièces de monnaie, sur lesquelles il grava le nom et l’image de Ḫosrō Parwez, fils de Hormizd, et les envoya furtivement à Séleucie où, les ayant vues passer entre les mains du peuple, des gens en informèrent le roi, qui résolut, de faire arrêter son fils. Celui-ci l’ayant appris, s’enfuit
dans l’Adorbedjan.
Hormizd avait traité l’armée avec rigueur et sévérité ; il avait confisqué ses biens, tué ses propres frères, arrêté les chefs, dont il avait confisqué les villages, et bâti à Huzistan et à Maherdja des cachots, où il avait jeté les notables de son royaume, auxquéls il donnait à manger du pain mêlé de gravier, et à boire de l’eau saumâtre. On l’arrêta et on fit chercher Ḫosrō Parwez et on le nomma roi. L’armée, craignant les ruses de Hormizd, lui creva les yeux.
Bahram Sobin, ayant connu cela, rassembla les troupes et marcha, faisant semblant d’être irrité de ce qui était arrivé au roi. Parwez, ne pouvant tenir contre lui, s’enfuit et se rendit auprès de Maurice, roi des romains, pour solliciter son secours contre l’usurpateur de son trône. Maurice lui donna en mariage sa fille Marie et lui donna des troupes ; il vint à Séleucie, mit Bahram en fuite et triompha ; et ainsi il devint le seul maître de l’empire. Nous avons déjà raconté comment il traita Išō‘-Yahb le jour où il entra victorieux sous les tentes que celui-ci lui avait dressées. Dès lors il l’aima comme auparavant et l’honora. Il eut les mêmes égards et de meilleurs encore pour le catholicos Sabr-Išō‘.
FAITS EURENT LIEU PENDANT CETTE ÉPOQUE
44. Histoire de Rabban Elie qui FONDA A MOSSOUL LE Monastère CONNU SOUS LE NOM DE Dayr Sa’id (v. 585)
Ce saint Elie, apres avoir fait ses etudes à Ḥīra, sa ville natale, se rendit auprès de Mar Abraham, dont il reçut l’habit monastique. Il servait les cenobites. Un fou, qui se tenait à la porte de la communauté, lui donna un violent soufflet sur la joue ; le saint lui présenta l’autre joue. Le demon, ayant vu son humilité, se retira de l’homme, qui fut immédiatement guéri. Ce miracle ayant été connu des frères, Elie abandonna le convent et alia dans le pays de Ninive, ou il se retira sur une montagne près du Tigre. II y avait là une forêt pleine de bêtes féroces. Le saint les en chassa par ses prières ; il bâtit dans ce lieu, qui est près de Mossoul, un monastère pour les moines qui s’étaient groupés autour de lui, et y établit la régle de Mar Abraham.
Ce couvent fut fondé an temps de Hormizd, fils de Ḫosrō Anoširwan. II guérit un enfant paralysé des mains, que lui envoya Isoyahb, évêque de Balad, qui fut ensuite Catholicos.
Ce saint avait le caractère violent des Arabes Quand il se vit affaibli, il confia les affaires à Ḥnan-Išō‘, qui fonda un convent dans la région dc Darabad. Après sa mort on l’ensevelit dans le monastère qu’il avait bâti. Que Dieu sanctilie son fane et que ses prières soient avec nous.
45. Histoire de Rabban Bar ‘Edtā
Ce saint était originaire de la region connue sous le nom dc Ninive. Sa mèrc etait stérile ; elle s’appliqua au jeune et a la prière, frequentant l’Eglise et suppliant Dieu de lui accorder un enfant. Dieu exauça sa prière, comme il avait écouté Hanna, et lui donna un fils, qu’elle appela Bar ‘Edtā, nom qui signifie : fils de l’Eglise. Elle le voua à Dieu comme Hanna avait voué Samuel. Quand il eut grandi, il alla à l’Ecole de Nisibe, on il rencontra Mar Abraham, dont il se fit le disciple. Il s’attacha à lui comme lonathan s’etait attache a David, et, après avoir suivi avec succès ses leçons, et reçu de ses mains le costume des spirituals, il se retira dans une caverne pour y vivre dans la solitude.
Après la mort de Mar Abraham, et la dispersion de ses enfants, dont Rabban Bar ‘Edta était le premier-né, celui-ci, accompagne de plusieurs moines, se rendit à la montagnc de Marga, ou il convortit boaucoup de Kurdes à l’habit monastique, ou il etablit une petite communaute de moines.
Il mourut le dimanche de Quasimodo, jour où chaque année on fait sa commémoraison, et il fut inhumé dans son couvent. Plusieurs saints personnages sortirent de ce couvent ; entre autres Siméon, fondateur du couvent de Senna, Rabban Yozadaq, Rabban Hormizd et Jean le Persan. Que leurs prières nous fortifient toujours. Amen.
46. — HISTOIRE DE RABBAN SIMÉON.
Cet homme était originaire de Cašcar. Il sortit de son pays pour chercher Dieu. le Très-Haut. Ayant rencontré un fleuve sur sa route, il fit sur l’eau le signe de la croix et le traversa, comme s’il eût marché sur la terre ferme ; cela eut lieu avant qu’il fût moine. Il alla trouver Rabban Bar ‘Edtā, et se retira non loin de lui dans une grotte, où il se nourrit longtemps du fruit d’un arbre appelé dabūta. Il gagna ensuite les bords du Jourdain, et y demeura en adorant Dieu ; il se nourisait des légumes qu’il semait lui-même. Une fois les sauterelles qui avaient ravagé la région, se dirigèrent vers le potager dont le saint tirait sa subsistance ; celui-ci cria devant eles d’une voix forte ; et ausitôt eles s’arêtèrent autour du jardin et l’épargnèrent. Mais le saint, ayant préféré ensuite subir l’épreuve avec les habitants de la contrée, permit aux sauterelles de ravager le potager. Il vécut encore pendant un certain temps de ce qui lui restait des légumes, jusqu’à ce qu’il n’y en eut plus. N’ayant alors rien à manger, il éprouva violement la faim. Il pria en disant :
« Seigneur ! c’est par amour pour toi que les prophètes et les apôtres ont été mis à mort et que. les martyrs ont été mis en pièces ; c’est encore par amour pour toi que j’ai abandoné le monde et que je vais soufrir la mort. »
Ausitôt qu’il se leva (de sa prière), il vit un home entrer chez lui dans la grotte ; il lui donna du pain et disparut. Il sut que c’était l’ange du Seigneur. Le pain descendit pour lui comme était déjà descendu le pain de la veuve au temps du prophète Élie Il en mangea longtemps; mais dès qu’il voulut changer de retraite, il n’en trouva plus trace.
A l’instar d’Habacuc, il fut enlevé et se trouva en terre persane. Ilhabita une grotte dans la montagne de Senna, où il fonda un couvent et yétablit des règles pour la direction de ses enfants. Les moines, avant entenduparler de lui, se rendirent auprès de lui de toutes parts. Yazdin, fils deSamta (ou l’inverse), s’étant plaint au Saint des mauvais traitements du gouverneur deBeyt Garmay celui-ci lui donna du Henné, lui conseillant dele porter sur lui quand il paraîtrait chez le gouverneur, pour qu’il fert àl’abri de ses injustices. Yazdin le fit ; le gouverneur lui montra de la sympathie et l’exempta des impôts qu’il lui réclamait.
Les démons jaloux fondirent une fois sur lui, et après lui avoir rasé la tête et la barbe, le garrottèrent, le frappèrent durement, et l’attachèrent à un arbre. Il resta ainsi jusqu’à ce que les moines, l’ayant aperçu, le firent descendre. Les moines le voyaient passer les nuits en prière et transporté hors de soi comme un homme ivre, de sorte que son manteau tombait de sur ses épaules et son bâton de ses mains, sans qu’il s’en aperçût.
Un des notables des chrétiens, gouverneur des provinces traversées par le Tigre, passa par le couvent, où il resta quelques jours. Ayant vu les oeuvres du Saint et les miracles qu’il opérait, il ne voulut pas le laisser là, mais au moment de son départ, il l’obligea de descendre avec lui. Le Saint, qui était déjà très avancé en âge et simple de coeur, sans savoir ce que cet homme voulait de lui, l’accompagna jusqu’au couvent de Ṣliba situé au bord du Serser.
C’était en effet là le pays de ce fonctionnaire, qui exprima son désir devoirle Saint habiter ce couvent. Le Saint, quoique affligé de cette manière d’agir,resta quelque temps au couvent, guérissant les malades qui venaient le trouver.ll mourut à l’âge de 120 ans et fut enseveli dans le temple ducouvent de Ṣliba.
Le Saint apparut ensuite plusieurs fois en songe à ,son disciple, luidisant : Transporte-moi d’ici à mon couvent. » Le disciple, qui était lesacristain, alla lanuit a sontombeau, enleva le cercueil et le porta danssa cellule. Avant remis le tombeau en état, comme il était, personne nes’en aperut. Le Saint était intactet cependant il y avait 2 ans qu’ilétait mort. Le disciple arriva ensuite à le transporter jusqu’à un vaisseau,qui appartenait à un homme de Karkha de Sūrra-Man-Rā’ (Samarrā’). Quand lecorps du Saint arriva là, les gens du pays, ayant appris l’affaire du Saint,donnèrent des présents au chef de la province, le priant d’enlever lesrestes du Saint à son disciple et de les ensevelir dans leur église. Leshabitants de Senna, avant eu nouvelle de cela, s’y opposèrent. Uneviolente querelles’alluma entre eux. Alors un habitant de Tagrīt intervint
et leur conseilla de mettre le cercueil dans un petit bateau, qu’on lanceraità l’eau et qu’on abandonnerait à lui-même, sans batelier. Si le bateauvenait à descendre le fleuve, ce serait un signe que Dieu avait choisi laville de Sourra-Man-Raâ pour la sépulture du Saint ; si au contraire lebateau venait à remonter le fleuve, ce serait évident qu’il fallait l’ensevelirdans son couvent de Senna. Le bateau, aussitôt qu’il eut reçu le cercueil,remonta les eaux, malgré le courant qui luttait contre lui pour le fairedescendre. A cette vue, tous les assistants furent stupéfaits. On fit accosterle bateau à Tagrit, où l’on fit monter le cercueil à l’église de cette ville,pour que les gens en reçussent sa bénédiction. Puis il fut porté à soncouvent, où il fut déposé.
Quand les brigands se multiplièrent dans la montagne et qu’il ne fut pluspossible à personne de la traverser, on fonda à côté de la ville un autre couvent, où l’on transporta les restes du Saint. Quelques moinesallèrent habiter le nouveau couvent ; les autres restèrent dans l’ancien.
47. HISTOIRE DE RABBAN GUIWARGUIS
Ce Saint était compagnon de Bar`Edta. Il sortit avec lui du couvent et s’installa dans la montagne d’Adiabène, se nourrissant de fruits et d’herbes. Les bergers, ayant vu son genre de vie, parlèrent
de lui aux gens du pays. C’est alors qu’il commença à guérir les malades.
Il fonda un monastère pour ceux qui étaient venus se grouper autour de lui ; il y établit la règle de Mar Abraham. Les fidèles du pays dont il avaitguéri les malades, lui donnèrent des métairies pour son couvent. Voyants’approcher l’heure de la mort, il résolut de fonder un autre couvent dansle pays de Marga. II s’y rendit ; il convertit beaucoup d’hérétiques, qui habitaientdans ces villages et bâtit un couvent (à l’est de Mossoul), où se réunirent les moines.
48. HISTOIRE DE JEAN FONDATEUR DU COUVENT D’ANḤEL.
A cette époque, ce Saint quitta le couvent de Mar Abraham, à cause d’un différend qui avait éclaté, à son grand regret, entre les frères et lui ; il se rendit dans le pays d’Arzoun et se fixa près d’un village appelé Anḥel, où iltransforma un temple d’idoles en monastère. Les moines se groupèrent autour de lui ; il opéra des miracles ; il changea une fois le vinaigre en vin. Il était doué d’une grande patience et d’une profonde humilité : deux vertus, qui le firent parvenir à cet état (de perfection). Il mourut vieux et fut inhumé dans son couvent, qui est connu sous le nom de monastère de Rabban Jean d’Anḥel
49. HISTOIRE DE RABBAN HAYA
Cet homme était de Cašcar. Ayant entendu parler de Mar Abraham, il affranchit ses esclaves, distribua ses biens, et se rendit auprès de lui. Il reçut de ses mains l’habit monastique, et se fixa dans le couvent avec un de ses esclaves, qui s’était fait moine avec lui. Après la mort de Mar Abraham, Rabban Haya alla au désert de l’Égypte et pria à Jérusalem. La grâce divine l’appela ensuite à retourner en terre Araméenne (An-Nabat) et à construire un couvent dans la région de Cacar. Il le fit. Sa haute réputation étant arrivée aux oreilles de Rabban Sabor, fondateur du couvent de Šūštar, celui-ci vint le trouver et passa quelque temps avec lui. Rabban Haya l’empêcha d’aller visiter Mar Abraham ; il lui fit connaître les règles que celui-ci avait établies pour les moines. Il les copia et retourna à son couvent de Šūštar. Rabban Haya fonda le couvent et y réunit des moines. Il avait des rapports d’amitié avec Théodore, le fondateur de l’École de Soutar’. Rabban Haya vécut longtemps ; chose curieuse, en effet, son nom signifie : il vit.
Après sa mort, il fut enseveli dans le couvent qu’il avait bâti. Que ses prières soient notre secours et notre assistance.
50. HISTOIRE DE RABBAN BABAY DE NISIBE.
C’est à cette époque aussi qu’appartient ce Bienheureux. Il était des notables de Nisibe. Dans sa jeunesse, il s’était adonné avec dérèglement à boire, aux chansons et au jeu. Dieu, qui voulut le choisir, lui envoya une vision, qui le troubla. Il se rendit auprès de Mar Abraham, qui, l’ayant
vu, lui prédit sa destinée et lui annonça qu’il serait un Père pour un grand nombre d’hommes. Il lui donna le nom de Babay et le reçut au nombre de ses enfants en lui donnant l’habit monastique.
Après la mort de Mar Abraham, il se retira dans une grotte dans la montagne d’Adiabène (Hazza) avec l’anachorète Išô‘-Zekha, et Sabr-Išō‘, qui devint catholicos. Ce sont ces deux derniers, qui firent sortir le démon d’An-Nu‘mān, roi de Ḥīra. I-Z admirait la dévotion de Babay, ses mortifications et ses bonnes oeuvres. Un jour qu’Išō‘ Alia était absent et se trouvait dans un couvent en Adiabene, on porta à ce dernier un enfant boiteux. Quand on arriva près de la grotte de Mar Babaï, le père de l’enfant s’assit pour se reposer de la fatigue de la route et pour manger
quelque chose. Les chameaux s’étant échappés, on descendit à leur recherche.
L’enfant, se voyant tout seul, se mit à pleurer. Mar Babay, que les cris de l’enfant avaient fait sortir de sa grotte, lui demanda pourquoi il pleurait.
Il lui répondit qu’il pleurait parce que ses parents venaient de le quitter. Le Saint lui dit de les rejoindre ; mais l’enfant lui fit savoir qu’il ne pouvait pas se mettre debout. Alors il le prit par la main et le fit se tenir sur ses pieds. Quand ses parents, à leur retour, le virent se tenant debout et qu’ils ne purent voir, malgré leurs recherches, un être humain qui l’eût guéri, ils allèrent voir Išō‘-Zkha pour lui faire connaître leur histoire.
« Ce n’est pas l’ange, leur dit-il, qui a guéri les pieds de votre enfant, ainsi que vous le pensez, mais c’est Mar Babaï de Nisibe, qui habite la grotte qui est près du village appelé Beyt Gammala. »
La patience de ce Saint à supporter les attaques des démons était inexprimable. Un jour ceux-ci se jetèrent sur lui, lui lièrent le cou d’une corde et l’attachèrent à un bois sur sa grotte. Mais Dieu ne leur donna point le pouvoir de le faire périr. Le Saint les ayant conjurés par la parole de Dieu, ils le laissèrent et prirent la fuite ; les frères vinrent et le délivrèrent. Il opéra bien des miracles. Longtemps après il jugea opportun de fonder un couvent dans la montagne d’Izla, il y établit la règle de Mar Abraham. Il survécut 31 ans à sa fondation ; après sa mort, ses restes furent inhumés dans son couvent. Nous en avons parlé en détail dans sa biographie que j’ai composée moi-même. Que ses prières nous conservent et nous donnent le salut.
51. — HISTOIRE DE RABBAN YAUNAN.
Un mazdéen avait un esclave, du nom de Yaunan. Celui-ci allait visiter souvent Mar Babay dans sa grotte pour s’entretenir avec lui. Un jour son maître l’envoya à la montagne d’Adiabène (gazza) pour lui rapporter du vin de sa vigne. L’esclave se dirigea vers la grotte de Mar Babay et s’arrêta chez lui ; et il se mit en retard pour l’exécution de l’ordre de son maître. Il eut peur alors de son maître, et s’en ouvrit à Mar Babaï. Celui-ci lui ordonna de remplir d’eau les outres à la fontaine qui coulait devant sa grotte et de l’apporter. Yaunan obéit. Son maître, l’ayant rencontré dans le chemin, but de cette eau, qu’il trouva être un vin excellent Informé ensuite de l’histoire de son esclave, il l’affranchit. L’esclave se rendit auprès de Mar Babay et resta chez lui pour je servir ; il s’instruisit dans les préceptes du christianisme et se fit moine. Quand Mar Babay se transporta au couvent qu’il construisit, Yaunan resta dans la grotte ; et, pour y conserver la tradition de Mar Babay, et pour loger les moines, qui, en apprenant son histoire, étaient venus se grouper autour de lui, il bâtit sur la place, tout près d’un village appelé Bati, un couvent, où il mourut et fut inhumé.
52. — HISTOIRE DE ŠAHRUSA
Ce Bienheureux, qui appartient lui aussi à cette époque, était des notables de. Nisibe. Il se rendit auprès de Mar Abraham’, et reçut de ses mains l’habit monastique. Après avoir mené pendant quarante ans la vie d’anachorète, supportant la chaleur et le froid et se privant de pain durant les 3 semaines (de jeûne), il se rendit aux pays de Qardou, où il bâtit un couvent pour les moines qui se réunirent auprès de lui. Après sa mort, il fut enseveli dans ce couvent.
53. HISTOIRE DE MAR YAHB (Yaima) L’ANACHORÈTE
Ce Saint appartient à cette époque. Ayant entendu parler de Daniel, disciple de Mar Abraham qui habitait à Cašcar, il vint le trouver, et resta chez lui pendant un mois. Puis il se sépara de lui et alla demeurer dans une grotte près du Grand Zab. Les pêcheurs le virent souvent faire le signe de la croix sur les eaux, et marcher sur le fleuve ; et ils l’entendirent qui disait dans sa prière, les bras levés au ciel, et les larmes plein les yeux. : « O Christ ! ton amour m’a tué. »
Yazdin, auquel Ḫosrō avait confié le gouvernement de plusieurs provinces de Beith Armâyé (Nabat) et de la Montagne, ayant entendu parler de lui, vint lui demander avec instance de prier Dieu de rendre la vie à l’un de ses fils, qui était mort, et il l’étendit devant la porte de sa grotte. Le Saint pria beaucoup ; Dieu l’écouta ; car l’enfant se leva et le Saint le rendit à son père, comme Élisée avait rendu à la veuve Sunamite son fils. Puis il quitta sa grotte. Notre Seigneur le Christ (que son nom soit adoré) lui révéla la retraite d’une femme anachorète, qui habitait une montagne ; il alla la visiter pour obtenir sa bénédiction. Il raconta que la chemise de la recluse était en pellicule de papyrus et que sa nourriture était les racines des plantes de la montagne.
Il fut enseveli après sa mort dans la grotte qu’il habitait. 24 ans après, Yazdin transporta ses restes à Karkha de Guédan et les mit dans le tombeau des martyrs. Il a écrit une lettre, dans laquelle il traite succinctement du Créateur (que son nom soit exalté) et des créatures. Elle a été commentée par Apnimaran supérieur du couvent de Za`faran. Que ses prières soient avec nous.
54. HISTOIRE DE RABBAN ŠABOR
Ce Saint était originaire d’Ahwāz, d’un village appelé Dolâb. Ses frères, dont il était le plus jeune, lui portaient envie, parce qu’une fois, par le signe de la croix, il avait multiplié un peu de blé qu’il avait, de sorte qu’il leur avait suffi pendant toute une année jusqu’à la première moisson.
Il fut choisi dès son enfance, à l’instar de Samuel, de Jérémie et de Jean-Baptiste. Après avoir fait ses études, il fut pendant un certain temps docteur dans l’école de Deyr-Miltrâq. Puis il se rendit à Šūštar, accompagné de 7 écoliers, qui menèrent avec lui une vie sainte. Ils allèrent bientôt voir à Cacar Rabban Hala , qui leur enseigna la vie monastique, et leur remit à eux et à Rabban Sabor la règle de Mar Abraham.
Il retourna au pays d’où il venait, et bâtit un couvent dans la montagne de Šūštar. Beaucoup de gens se groupèrent autour de lui. Il convertit les Kurdes voisins.
Il vécut jusqu’à l’époque de Išō‘-Yahb (III, 648-58), le dernier catholicos de ce nom.
Celui-ci le vit, le reçut et lui demanda : « Qui t’a enseigné la vie monastique ?
-La règle, répondit-il, de Mar Abraham, et Rabban Haya. »
Quand Jean, fils de Marta (682-4), qui devint catholicos, Isaac, qui fut consacré évêque de Karkha de Suse, et Sourin qui fut évêque de Mihraja se rendirent au couvent de Rabban Šabor
« Dieu, leur dit ce Saint, vous a choisis pour être pasteurs dans son Église ; la grâce vous appellera bientôt. Accomplissez bien ce dont vous serez dignes. »
Sa parole s’accomplit à la lettre.
Un jour il y eut un énorme serpent, de la bouche duquel sortaient comme des étincelles de feu. Le Saint l’ayant conjuré par la parole de Dieu, il devint comme une chaîne étendue depuis le sommet de la montagne jusqu’à son pied : ce qui se voit aujourd’hui encore et plonge dans
l’étonnement tous les visiteurs.
Puis Rabban Sabor mourut et fut inhumé dans son couvent devant le temple. Parmi ses disciples, nous citons Rabban Klioudawi, le fondateur du couvent de Beyth Hâlé, Malki-ôr 2 , le fondateur de `Oumra Hadiha 3 à Goundiabor et ‘Ammeh , le fondateur du couvent de Qalīkān. Que les
prières de tous (ces saints) soient avec nous.
55. HISTOIRE DE MAURICE, Roi DES Romains.
Nous avons déjà dit que Tibère, roi des Romains, qui mourut en 894 (583) d’Alexandre, ne laissa aucun fils pour lui succéder. Maurice, mari de sa fille et général de ses armées, qu’il avait désigné pour son successeur, régna après lui. Il était bon et vertueux. Il gouverna l’empire
avec sagesse. Dieu le fit triompher de tous les ennemis qui l’attaquèrent ; il remplit d’argent les trésors de l’État. ll confessa publiquement la dualité de Natures dans le Christ et écrivit à ses gouverneurs d’exiler ceux qui s’opposaient à cette croyance : ainsi les églises furent débarrassées des hérétiques. Que Dieu lui fasse miséricorde.
56. HISTOIRE DE RABBAN JACQUES (m. v. 628), LE FONDATEUR DU COUVENTDE BEYT‘ĀBĀ
Ce Saint était originaire de la ville de Laâlln dans la province de Beyt Garmay. Son père et sa famille étaient au service de Ḫosrō ; maisdes détracteurs les desservirent auprès du prince, qui confisqua leurs biens etjeta l’oncle de Jacques en prison, Jacques, que Dieu voulait choisir, abandonna ses biens et se rendit à Margā s’expatriant ainsi à l’instar de Moïse, de Jacob et de Joseph. Il s’appliqua à l’étude dans l’école de ce pays ; sa renommée se répandit alors. Il était beau et éclatant de visage.
Puis il fut docteur de l’école pendant 8 ans. Il en convertit plusieurs et détourna beaucoup de gens de l’idolâtrie.
Ayant entendu parler du couvent de Mar Abraham, il s’y rendit et y resta 7 ans avec Babay le Grand, Babay de Nisibe, Dadieb et leurs compagnons. Il habitait dans une cellule isolée. Il en sortit ensuite, malgré son désir, appréhendant la gloire et la grandeur auxquelles Dieu l’appelait. Il fut accompagné de 7 moines de différentes régions.
Išō‘-Yahb d’Adiabène,qui devint catholicos, se fit son disciple.
Il ne dormit pas une fois depuis qu’il se fit moine ; s’il se sentait vaincu par le sommeil, il se levait pour prier.
Il surpassa par son enseignement Grégoire, métropolitain de Nisibe, homme célèbre par ses vertus.
Une fois, trois femmes stériles vinrent lui demander de prier pour elles afin qu’elles eussent des enfants. Il prit une petite pièce d’étoile qu’il trouva dans sa cellule, la coupa en trois morceaux et en donna un à chacune d’elles. Un an après, elles vinrent le voir portant chacune leur fils et firent au couvent de grandes largesses.
Ce Saint vécut longtemps, jusqu’aux derniers jours de Ḫosrō, le dernier. Après sa mort, il fut enseveli dans son couvent, qui a été appelé de son nom.
57. — PETITE ANECDOTE DU PRETRE QUI SACRIFIAIT AU DÉMON.
Il y avait dans la région de Beyt Nouhadra une ville appelée Piroz-Sabor (différent de celui d’Anbar), malheureux ses habitants ! ‘ Il s’y trouvait un évêque isolé, nommé Ezéchiel, et un écolier appelé Isaac, qui ne savait pas beaucoup de choses. Celui-ci en sortit et alla à Ḥarran. Quand il fut de retour dans son pays, on le trouva instruit et intelligent et l’on gouta beaucoup sa parole ; aussi le chargea-t-on d’être interprète dans l’école de la ville. Mais lui servait les démons et leur sacrifiait en secret. A l’approche du Carême, le démon qu’il servait exigea de lui qu’il lui sacrifiât selon sa côutume. Isaac, qui se repentait de sa conduite, résista pendant tout le Carême. Le dimanche des Rameaux, le démon fit tous ses efforts pour le forcer à sacrifier. Mais il refusa encore et lui demanda un délai. Le jour de Pâques, Isaac ayant voulu paraître devant le peuple afin de débiter une homélie qu’il avait préparée pour la fête, son ami se cramponna à sa personne, et lui dit :
« Si tu ne m’offres pas aujourd’hui un sacrifice, je te tue. »
Isaac s’efforça d’obtenir un délai ; ce fut en vain.
« Je t’ai élevé à ta situation, lui dit le diable, et je t’ai établi maître, toi qui étais inférieur et dédaigné ; et toi, depuis le commencement du Carême, tu me trompes par tes promesses. Tu as deux poules; sacrifie-les moi ; sinon, je te tue ! »
Isaac l’implora avec insistance en lui demandant un délai. Le diable refusa et lui porta sur la tête un coup, qui le fit tomber par terre. Les écoliers, qui entendirent son cri, se précipitèrent, et le trouvèrent étendu par terre. Il leur raconta ce qui s’était passé, et les conjura de ne pas l’inhumer avec les cérémonies, mais de le jeter du haut en bas de la montagne. Quand il fut mort, ils le traitèrent comme il l’avait demandé. Que Dieu le Très-Haut nous délivre des ruses du démon et nous tire de ses filets !