Le Vandale refusa de voir là une intervention divine : aussi la colère de Dieu ne tarda-t-elle pas à s’abattre sur sa maison. Lui et ses fils moururent subitement; ses esclaves et son meilleur bétail le suivirent de près dans le trépas. La veuve de ce Vandale, privée tout d’un coup de son époux, de ses fils et de tous ses biens, offrit les serviteurs du Christ à un parent du roi, nommé Sersaon. Eu reconnaissance d’un don si gracieux, celui-ci lui en témoigna toute sa satisfaction; mais aussitôt le démon se mit à tourmenter de mille manières les fils et les serviteurs de ce pauvre homme, à cause des chrétiens qu’on lui avait donnés. Le roi en fut averti : il ordonna alors qu’on les reléguât chez un certain roi Maure, nommé Capsur. Quant à Maxima, honteux d’avoir été vaincu par elle, il lui rendit sa liberté : jusqu’à ce jour, elle a conservé sa virginité et est devenue la mère de nombreuses vierges du Seigneur. Il nous a même été donné de la visiter souvent.
Les serviteurs de Dieu, arrivés au terme de leur voyage, furent remis a ce roi Maure, qui habitait une contrée déserte, nommée Capra-Picta.
Voyant les rites sacrilèges que pratiquaient ses sujets idolâtres dans leurs sacrifices, ils entreprirent de leur faire connaître notre Dieu par leurs paroles et leurs exemples : ils gagnèrent ainsi au Christ une multitude d’infidèles, à qui personne auparavant n’avait parlé du nom chrétien. Ce champ une fois remué et sarclé par le soc de la prédication, on songea à y faire jeter la semence évangélique et à répandre sur lui la rosée du saint baptême. Les serviteurs de Dieu choisirent alors des hommes de confiance et les engagèrent sur les routes interminables du désert. Ils atteignirent enfin la ville de Rome, et là ils supplièrent l’évêque d’envoyer à ce peuple converti un prêtre et des diacres. Le prélat se fit un plaisir de condescendre au désir qui lui était exprimé ; on construisit alors une église, et une foule immense de barbares reçurent le saint baptême, et de ces loups sortit un troupeau d’agneaux que sa fécondité multipliait sans cesse.
Capsur prévint Geisérich de ce qui se passait. À cette nouvelle, le roi Ne put retenir sa colère : il ordonna de faire périr les serviteurs de Dieu de la façon suivante : on les attacherait par les pieds à la queue de quatre chevaux attelés ensemble et lancés au galop à travers les buissons épineux des forêts; les corps de ces innocentes victimes, traînés ainsi en tous sens, au milieu des épines et des broussailles, seraient déchirés en lambeaux : toutes choses étaient arrangées de manière qu’ils pussent assister au trépas les uns des autres. Les chevaux indomptés les entraînèrent donc, ainsi liés, dans leur course furieuse.
Les Maures se lamentaient d’un tel spectacle; mais eux, se voyant dans cette position, si rapprochés les uns des autres, et malgré l’horreur de cette course vagabonde, se disaient mutuellement adieu en ces termes : « Priez pour moi, mon frère, voici que le Seigneur a comblé nos désirs; ainsi parviendrons-nous au royaume des cieux ! »
Ils rendirent saintement leur âme à Dieu au milieu de leur prière et du chant des psaumes, à la grande joie des anges. Depuis lors, notre Seigneur Jésus -Christ n’a cessé de produire en cet endroit les plus grands miracles : l’ancien évêque de Buconita, le bienheureux Fausta, nous a notamment raconté la guérison d’une aveugle, guérison dont il avait été témoin.