Alors les Roûm sollicitèrent le concours des Berbères, qui répondirent en grand nombre à cet appel, et une sanglante bataille fut livrée, où les musulmans faillirent succomber sous le nombre; mais, grâce à la protection divine, les alliés furent battus et perdirent une foule des leurs, en outre de leurs richesses et de leurs armes, ‘Uqba, poursuivant sa marche en avant, arriva à Tanger, où Ilyân (Julien), patrice de Roûm, vint lui présenter de riches cadeaux et reconnaître son autorité. Interrogé sur l’Espagne, le chrétien lui en dit l’importance; des Berbères, sur qui des renseignements lui furent aussi demandés, il dit que leur nombre n’était connu que de Dieu seul, qu’ils habitaient dans le Soûs citérieur et que, restés infidèles et non convertis au christianisme, leur puissance était très grande.
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Il fit ensuite campagne jusqu’à Tanger contre les Berbères encore insoumis, qui s’enfuyaient craintivement devant lui ; il les poursuivit en en tuant un grand nombre jusqu’au Soûs citérieur sans que personne tentât de résistance sérieuse, et alors les Berbères lui demandèrent quartier en offrant de se soumettre. Il nomma gouverneur de Tanger son affranchi, T’ârik’ ben Ziyâd, que l’on dit être Çadefite [d’adoption, mais Berbère d’origine] et y laissa avec lui un corps d’armée important formé de Berbères, et en outre des Arabes chargés d’enseigner à ceux-ci le Koran et les pratiques religieuses.
Moûsa laissa pour gouverner l’Espagne son fils ‘Abd el-‘Azîz ben Moûsa ; après être débarqué à Ceuta, il nomma gouverneur de cette ville, de Tanger et de la région avoisinante, un autre de ses fils, ‘Abd el-Melik, et il plaça à la tête de l’Ifrîkiyya et de ses dépendances, son fils aîné ‘Abd Allâh.