COSTUMES DE TETOUAN A FES
De Tétouan à Fâs, l’habillement est uniforme, c’est, pour les gens dans l’aisance, une chemise de coton ou de laine, une jelabya blanche, un Hayk ; les pauvres portent des jlabyas de couleur ou des lambeaux d’étoffe blanche dont ils se couvrent comme ils peuvent. Les uns et les autres vont la plupart tête nue ; quelques uns s’enroulent autour de la tête un turban étroit et mince qui en laisse le sommet découvert. En fait d’arme, on a le fusil à un coup, à pierre ; canon long, large crosse triangulaire de bois noirci ; la crosse est très simple, sans autres ornements que de légères incrustations de fil d’argent. Ces fusils se fabriquent surtout à tétouan. La poudre se porte dans des boîtes de bois en forme de poire ; elles sont toutes couvertes de gros clous de cuivre et de sculpures coloriées. Les sabres sont rares dans cette région, les cavaliers seuls en ont. Les lames en sont courtes (70 à 80 cm), droites ou peu recourbées, très flexibles : les poignées, de corne ou de bois, avec gardes et branches de fer ; les fourreaux, de bois couvert de cuir, avec garniture en cuivre […] tout le monde, hors des villes, porte habituellement le poignard, même étant désarmé ; il sert au besoin de couteau […]
-l’un est court et à lame courbe, seul usité dans le […] sud […]
-l’autre plus long et à lame droite, en usage dans le nord […]
[…]
Administration de Fès
La ville et la province de Fâs sont administrées par trois bachas, commandant chacun à une portion de la ville et à un certain nombre de tribus de la campagne
-Le basha Sidi ‘Abd Allah a deux khulafâ’ nommés directement par le sultan [ ;..] Fâs al-Qadîm, gens du Rif du Gihgeb et le Lemta, le Jbal Zarhûn avec Zawyat Mawlây Idrîs dont il nomme le Qâ’id (des shyûkh dans les autres dwawâr du Zarhûn et els Wulad Al-Haj habitant autour du pont du Sebou.
-Le basha Wuld Ba Muhammad. Il est assisté d’un khalifa nommé par le sultan, sous son autorité, le Mllah de Fâs, les Wulad Jmâ3 (deux marchés), les Bihalîl, les Wulâd Al-Haj de la route de Fâs à Sfrû, les Shaja3 … […] toutes ces tribus sont dites de plaines, voici maintenant les tribus de montagne : Fishtâlâ, sur le chemin du Rîf à une demi-journée de Fâs, les Bnî Wuriaghal(…au-delà…) […] c’est le basha qui nomme les chefs ;: ceux de plaine sont dits khulafâ’ d-sûq parce que c’est sur les marchés qu’ils rendent justice, dans la montagne, ils portent le nom de shyûkh.
-Le basha Haj Sa‘îd, [ …] de Qasbat-Shirardâ […] secondé par un khalîfa.
Il n’y a point de grand commandement dans le blâd al-Makhzin […] chaque tribu de quelque importance, chaque cité, chaque province a son qâ’id, nommé directement par le sultan et ne relevant que de lui. Bien plus, dans les capitales, à Fâs et à Murrâkush et dans les grandes tribus telles les Haha, les Shawya… l’autorité est répartie entre plusieurs gouverneurs qui portent le titre de Basha dans les résidences impériales, M, Fâs, Miknâs, celui de Qâ’id partout ailleurs.
Cette extrême division du pouvoir a pour but d’empêcher les révoltes, le soin constant du sultan est de veiller à ce que personne dans ses Etats ne devienne trop riche, ne prenne trop d’influence, il suffirait de si peu pour renverser son trône chancelant !
Le Jbal Zarhûn, ce massif, sans autres arbres que ceux de ses jardins, est d’un fertilité extraordinaire ; ses pentes, sainsi que le plateau qui le couronne, sont couverts de vergers et de culture ; il est renommé pour ses olives, ses raisins, ses oranges, ses fruits de toute espèce. La population y est très dense ; du chemin, on distingue à son flanc les masses blanches d’un grand nombre de villages ; ceux-ci renferment, dit-on, des maisons aussi belles que els plus belles de Fâs. Les habitants du Zarhûn, comme les nomades du Sa’is, ne parlent que l’arabe.
[…]
Blad Makhzen
Nous quittons donc pour longtemps les Etats du Sultan, le blad al-makhzin, triste région où le gouvernement fait payer cher au peuple une sécurité qu’il ne donne pas ; où ; entre els voleurs et le qâ’id, riches et pauvres n’ont point de répit ; où l’autorité en rpotège personne, menace els biens de tous ; où l’Etat encaiusse toujours sans jamais faire une dépense pour le bien du pays ; où la justice se vend ; où l’injustice s’achète, où le travail ne profite pas ; ajoutez à cela l’usure et la prison pour dettes : tel est le blad al-Makhzin.
On travaille el jour, il faut veiller la nuit ; ferme-t-on l’œil un instant, les maraudeurs enlèvent bestieux et récoltes ; tant que l’obscurité dure, ils tiennent la campagne : il faut placer des gardiens ; on n’ose sortir du village ou du cercle des tentes ; toujours sur le qui-vive. A force de fatigues et de soins, a-t-on sauvé les moissons, les a-t-on rentrées, il reste encore à al dérober au qâ’id : on se hâte de les enfouir, on crie misère, on se plaint de sa récolte !
Des émissaires veillent : ils ont vu que vous alliés au marché sans y acheter de grains, donc vous en avez ; vous voilà signalé : un beau jour, une vingtaine de mkhaznî arrivent, on fouille la maison, on enlève le blé et le reste ; aviez vous des bestiaux, des esclaves, on les emmène en même temps : vous étiez riche le matin, vous êtes pauvre le soir. Cependant, il faut vivre, il faudra ensemencer l’année prochaine : il n’y a qu’un ressource, le Juif.
Si c’est un honnête homme, il vous prête à 60%, sinon à bien davantage, alors c’est fini, à la première année de sécheresse, viennent la saisie des terres et la prison ; la ruine est consommée.
Telle est l’histoire qu’on écoute à chaque pas, en quelque maison que l’on entre, on vous la répète. Tout se ligue, tout se soutient pour qu’on ne puisse échapper. Le qâ’id protège le Juif, qui le soudoir ; le sultan maintient le qâ’id, qui apporte chaque année un tribut monstrueux, qui envoie sans cesse de riches présents, et qui enfin n’amasse que pour son seigneur, car tôt ou tard tout ce qu’il possède sera confisqué, ou de son vivant, ou à sa mort. Aussi règne-t-il dans la population entière une tristesse et un découragement profonds : on hait et on craint les qâ’ids ; parle-t-on du Sultan, Tmmâ3 bzzâf : « il est très cupide » vous répond-on : c’est tout ce qu’on en dit, c’est tout ce qu’on en sait. Aussi combien ai-je vu de Marocains, revenant d’Algérie, evier le sort de leurs voisins : il est si doux de vivre en paix !Qu’on peu ou qu’on ait beaucoup, il est si doux d’en jouir sans inquiétude ! Les routes sûres, les chemins de fer, le commerce facile, le respect de la propriété, paix et justice pour tous, voilà ce qu’ils ont vu par delà la frontière. Que leur pays, si misérable quoique si riche, serait heureux dans ces conditions !
COSTUME ZAYYAN HOMMES ET FEMMES
Les Zemmour, ainsi que les Zayan chez qui nous entrerons ensuite se distinguent des autres tribus que j’ai vues au Maroc par le primitif de leur costume : hommes te femmes y sont fort peu vêtus ; leur habillement ets le suivant : pour les hommes riches, point de chemise ni de caleçon, une simple farazya et par-dessus un burbûs ; les pauvres n’ont que le burnûs ; en marche, ils le plient, le jettent sur l’épaule et vont nus. Les premiers ont sur la tête soit un turban de cotonnade blanche, soit un mouchoir blanc et rouge ; les pauvres sont tête nue. Les uns et les autres se rasent les cheveux ; mais, chose que je n’ai également vue que là, ils conservent au dessus de chaque oreille une longue mèche semblable aux Nwadir des Juifs. (israelites marocains).
Les Zemmour les portent toutes deux, les Zayan n’en ont qu’une : c’est la seule différence de mode entre les deux tribus. Cette mèche est, pour les jeunes élégants, l’objet de soins minutieux : ils la peignent, puis, la tressant, en forment une petite natte. Le même usage existe, m’a –t-on dit, chez les Shawya. Le costume des femmes est aussi de splus légers : c’est une simple pièce d’étoffe rectangulaire, de cotonnade ou plus souvent de laine, dont les deux extrémités sont réunies par une couture verticale, il y a trois manières de le porter :
1) en le retenant par des broches (khelal en argent) ou de simples nœuds au dessus de chaque épaule
2) en retroussant et attachant le bord supérieur au dessus des seins, les épaules et le haut de la gorge demeurant découverts
3) en laissant retomber la partie supérieure, le corps restant nu jsuqu’à la ceinture.
Dans les trois cas, le vêtement est retenu à la taille par une bande de laine ; il est assez court : il ne descend guère au dessous du genou. On le porte de la première façon opur sortir, de la seconde pour travailler hors de la tente, de la troisième à l’intérieur. Les femmes s’entourent plus ou moins la tête de chiffons ; jamais elles ne se voilent.