117 : Amr, chef de l’armée musulmane, ayant établi son camp devant la citadelle de Babylone, assiégeait les troupes qui y étaient enfermées.
Celles-ci, ayant obtenu de lui la promesse d’avoir la vie sauve, et s’étant engagées, de leur côté, à lui abandonner tout le matériel de guerre, qui était considérable, il leur ordonna de sortir de la citadelle. Elles emportèrent une petite quantité d’or et partirent. C’est de cette manière que la citadelle de Babylone d’Egypte fut prise, le lendemain de la fête de la Résurrection.
Dieu châtia ainsi ces hommes qui n’avaient pas respecté la Passion rédemptrice de Notre-Seigneur et sauveur Jésus-Christ, qui donne la vie à ceux qui croient en lui, et il les fit fuir devant leurs ennemis. Le jour même de la fête de la Sainte-Résurrection, en rendant la liberté aux prisonniers orthodoxes, ces ennemis du Christ ne les avaient pas laissés partir sans les maltraiter : ils les avaient flagellés et leur avaient coupé les mains ; et en ce jour, ces malheureux gémissaient, les larmes inondaient leurs visages, et ils furent repoussés avec mépris.
En effet il est écrit, au sujet de ces misérables : “ils ont profané l’Eglise par une croyance corrompue ; ils ont commis tous les crimes et les violences de la secte des Ariens, tels que n’en avaient pas commis les païens ni les barbares ; ils ont méprisé le Christ et ses serviteurs ; et nous n’avions pas trouvé de pareils malfaiteurs parmi les adorateurs des fausses divinités. Et Dieu, dans sa longanimité, tolérait les apostats et les hérétiques qui, par soumission envers les puissants empereurs, avaient été baptisés une seconde fois. Mais ce même Dieu rétribue chacun selon ses œuvres et fait réparation à ceux qui ont subi l’injustice. Alors n’est-il pas préférable de supporter avec patience les épreuves et les tourments qu’ils nous infligent ! Ils croyaient, par cette manière d’agir, honorer le Christ Notre-Seigneur, mais ils se trouvaient être des mécréants. Ils ne se croyaient pas hérétiques et persécutaient, au contraire, ceux qui n’étaient pas d’accord avec eux dans la foi. Que Dieu nous préserve d’un tel accord ! Car ils n’étaient pas des serviteurs du Christ ; ils s’imaginaient seulement qu’ils l’étaient.”
La prise de la citadelle de Babylone et de la ville de Nikiû par les musulmans affligea beaucoup les Romains.
‘Amr, après avoir terminé la lutte, fit son entrée dans la citadelle de Babylone, réunit un grand nombre de bateaux, grands et petits, et les fît attacher près du fort qu’il occupait.
Menas, chef des Verts, et Cosmas, fils de Samuel, capitaine des Bleus, avaient bloqué la ville de Misr et avaient harcelé les Romains, du temps des musulmans ; des guerriers, pleins d’audace, venaient en bateaux, de la rive occidentale du fleuve, et le parcouraient pendant la nuit.
Amr et l’armée musulmane, allant par terre, à cheval, arrivèrent à la ville de Kebryâs d’Abâdyâ. A cette occasion, ils attaquèrent le général Domentianus. Celui-ci, en apprenant l’arrivée de l’armée musulmane, monta sur un bateau et prit la fuite, abandonnant l’armée et la flotte. Il voulait entrer dans le petit canal qu’Heraclius avait fait creuser pendant son règne ; mais, le trouvant fermé, il se rendit à Alexandrie.
Les soldats, voyant que leur général avait pris la fuite, jetèrent leurs armes, et se précipitèrent dans le fleuve, en présence de l’ennemi. Les musulmans les massacrèrent au milieu du fleuve, et il n’en échappa qu’un seul homme, nommé Zacharie, qui était un vaillant guerrier. Les bateliers, après la fuite de l’armée, s’enfuirent également et retournèrent dans leur province. Les musulmans vinrent ensuite à Nikiû et s’emparèrent de la ville, n’y trouvant pas un soldat pour leur résister. Ils massacraient tous ceux qu’ils rencontraient, dans la rue et dans les églises, hommes, femmes et enfants, sans épargner personne. Puis ils allèrent dans d’autres localités, les saccagèrent et tuèrent tous ceux qu’ils trouvaient. Dans la ville de Sa, ils rencontrèrent Esqoûtâçs et ses gens, qui étaient de la famille de Théodore le général, dans un clos de vignes, et ils les massacrèrent. Mais taisons-nous maintenant ; car il est impossible de raconter les horreurs commises par les musulmans, lorsqu’ils occupèrent l’île de Nikious, le dimanche, 18ième jour du mois de guenbôt, dans la 15ième année du cycle, ainsi que les scènes terribles qui se passèrent à Césarée en Palestine.
Théodore, commandant de la ville de Kîlûnâs, avait quitté cette ville, en y laissant, pour la garder et pour repousser les musulmans, une garnison sous le commandement d’Etienne, et s’était rendu en Egypte. Il y avait avec les musulmans un juif qui se rendit en Egypte. Lorsque, après de longs efforts, les musulmans eurent fait tomber les murs de la ville, ils s’en emparèrent sur-le-champ, tuèrent des milliers d’habitants et de soldats, firent un énorme butin, emmenèrent en esclavage les femmes et les enfants, qu’ils se partagèrent, et laissèrent la ville complètement vide. Peu de temps après, ils allèrent en Chypre et tuèrent Etienne et ses gens.