Dans tous les wagons de marchandises campent des familles kazakhes en guenilles. Elles tuent le temps en cherchant mutuellement leurs poux. […] Le train s’arrête au milieu d’une région desséchée. Empilés au bord du rail, il y a des chameaux, du coton qu’on décharge et pèse, des tas de grains de blé à l’air libre. Des wagons kazakhs sort un sourd martèlement qui se répète jusqu’au bout du train. Intriguée, je découvre que des femmes pilonnent des graines dans un mortier et font de la farine. Les enfants demandent à être posés sur le sol ; ils ont un quart de chemise sur leurs épaules et des croûtes sur la tête. Une femme remet son turban-fichu blanc, seule pièce de son habillement qui ne soit pas en lambeaux, et je vois ses cheveux poisseux et ses pendants d’oreilles en argent. Son petit, qui s’accroche à sa robe est porté par de maigres jambes où les os du genou saillent ; son petit derrière est vidé de sa chair, baudruche fripée aux plis nombreux. D’où viennent-ils ? Où vont-ils ?