Nous raconterons brièvement les grands faits d’Aram, ses actions glorieuses en Occident, rapportées dans le livre, ses différends avec les Assyriens, en signalant seulement les causes et l’importance des événements, et en montrant rapidement ce que l’historien raconte avec de longs détails.
Ce même Aram, après avoir terminé sa guerre contre l’Orient, marche avec les mêmes troupes en Assyrie. Il y trouve un homme qui ruinait sa patrie avec quarante mille fantassins et cinq mille cavaliers; il était de la race des géants et avait nom Parscham. A force d’opprimer le pays, de l’accabler d’impôts, il changeait en désert toute la contrée d’alentour. Aram lui livre bataille, le jette, fugitif, au milieu du pays des Gortouk, dans la plaine d’Assyrie, et extermine un grand nombre d’ennemis. Parscham mourut sous les coups des soldats d’Aram. Déifié à cause de ses nombreux exploits, (Parscham) fut adoré longtemps par les Syriens. Une grande partie des plaines de l’Assyrie devint, pendant de longues années, tributaire d’Aram.
Il nous faut parler maintenant des prodiges de valeur qu’Aram fit en Occident contre les Titans. Il marche ensuite sur l’Occident, avec quarante mille fantassins et deux mille cavaliers, arrive en Cappadoce, dans un endroit appelé aujourd’hui Césarée. Comme il avait soumis l’Orient et le midi et qu’il en avait confié la garde à deux familles, l’Orient à celle des Sissagan et l’Assyrie à ceux de la maison de Gatmos, il n’avait plus dès lors aucune crainte de troubles.
Pour cela, Aram s’arrête longtemps en Occident. Baïabis Kaghia lui livre bataille; ce Titan occupait tout le pays situé entre les deux grandes mers, le Pont et l’Océan. Aram fond sur lui, le défait, le refoule jusque dans une île de la mer asiatique. Puis laissant un de ses parents, nommé Mschag, avec dix mille hommes de ses troupes pour garder le pays, il retourne en Arménie.
Aram enjoint aux habitants du pays d’apprendre à parler la langue arménienne, c’est pourquoi jusqu’à ce jour, ils appellent cette contrée Proton Armenia, qu’on traduit par Première Arménie. Le village que le gouverneur établi par Aram, et qui s’appelait Mschag, fonda et entoura de petites murailles, et auquel il donna son nom, les anciens habitants du pays le nommaient Majak, ne pouvant bien prononcer; jusqu’à ce qu’ensuite agrandi par d’autres, ce village fut nommé Césarée. C’est ainsi qu’Aram, depuis ces lieux jusqu’a son propre empire, remplit d’habitants beaucoup de contrées désertes, et le pays fut nommé la Deuxième, la Troisième et même la Quatrième Arménie.[108] Voilà la première et la véritable raison d’appeler les parties occidentales de notre pays, Première, Seconde, Troisième et Quatrième Arménie. Et ce que disent certaines personnes de l’Arménie grecque, ne nous plaît aucunement que les autres fassent à leur guise!
Le nom d’Aram est tellement puissant et renommé jusqu’à ce jour, comme tout le monde le sait, que les nations qui nous entourent, le donnent à notre pays. On raconte d’Aram bien d’autres actions d’éclat; mais nous en avons dit assez sur ce sujet.
Mais pourquoi ces faits ne furent-ils pas consignés dans les livres des rois et des temples ?
Cependant que personne ne conçoive à cet égard ni doute, ni suspicion. Car premièrement, Aram est antérieur au règne de Ninus, époque où personne ne se préoccupait de tels soins; et deuxièmement, les peuples ne sentaient ni l’utilité, ni le besoin, ni l’intérêt de s’occuper des nations étrangères, des pays lointains, de recueillir les anciennes traditions, et les récits des premiers âges dans les livres de leurs rois ou de leurs temples; d’autant plus que la valeur et les exploits des peuples étrangers n’étaient pas pour eux un motif de vanité ou d’orgueil. Et, bien que non consignés dans leurs propres livres, ces faits, comme le raconte Mar Apas Catina, ont été extraits des ballades et des chants populaires, composés par quelques obscurs écrivains, et se trouvent réunis dans les archives royales. Il y a une autre raison, dit-il encore, c’est que, comme je l’ai appris, Ninus, homme imprudent et égoïste, voulant se donner comme le principe unique, le premier auteur de toute conquête, de toute qualité et de toute perfection, fit brûler quantité de livres d’annales des premiers âges qui se conservaient dans différents endroits et relataient les actes de bravoure de tels ou tels personnages; il fit également détruire les annales relatives à son époque, exigeant que l’histoire n’écrive que pour lui seul. Mais il est superflu de répéter tout ceci,
Aram engendra Ara; puis ayant encore vécu de longues années, il mourut.