Son Excellence le Président de la République française ; Sa Majesté l’Empereur d’Allemagne, roi de Prusse ; Sa Majesté FEmpereur d’Autriche ; Sa Majesté le Roi des Belges ; Sa Majesté le Roi de Danemark ; Sa Majesté le Roi d’Espagne ; Son Excellence le Président des Etats-Unis d’Amérique ; Sa Majesté la Reine du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande ; Sa Majesté le Roi d’Italie ; Sa Majesté le Sultan du Maroc ; Sa Majesté le Roi des Pays-Bas ; Sa Majesté le Roi de Portugal et des Algarves ; Sa Majesté le Roi de Suède et de Norvège.
Ont reconnu la nécessité d’établir sur des bases uniformes l’exercice du droit de protection, et de régler certaines questions qui s’y rattachent, ont nommé pour leurs plénipotentiaires à la conférence qui s’est ouverte à Madrid, savoir :
LE PREMIER. — Les conditions dans lesquelles protection peut être accordée, sont celles qui sont inclues dans le traité britannique et espagnol avec le gouvernement marocain et dans la convention […] la France […] en 1863, sauf les modifications qui y sont portées par la présente convention.
2. — Les Représentants étrangers, chefs de mission, pourront choisir leurs interprètes et employés parmi les sujets marocains et autres.
Les ^protégés ne seront soumis à aucun droit, impôt quelconque, en dehors de ce qui est stipulé aux articles 12 et 13.
3. — Les Consuls, Vice-Consuls ou Agents consulaires, chefs de poste qui résident dans les Etats du Sultan du Maroc, ne pourront choisir qu’un interprète, un soldat et deux domestiques parmi les sujets du Sultan, à moins qu’ils n’aient besoin d’un secrétaire indigène.
[…]
4. — Si un Représentant nomme un sujet du Sultan à un poste d’Agent consulaire dans une ville du Maroc, cet agent sera respecté et honoré, ainsi que sa famille habitant sous le même toit, laquelle, ainsi que lui-même, ne sera soumise à aucun droit, impôt ou taxe quelconque, en dehors de ce qui est stipulé aux articles 12 et 13, mais il n’aura pas le droit de
protéger d’autres sujets du Sultan, en dehors de sa famille.
Il pourra, toutefois, pour l’exercice de ses fonctions, avoir un soldat protégé.
Les Gérants des vices-consulats, sujets du Sultan, jouiront pendant Texercice de leurs fonctions, de mêmes droits que les Agents consulaires sujets du Sultan.
Art. 5. — Le Gouvernement marocain reconnaît au Ministres, chargés d’affaires et autres Représentant le droit qui leur est accordé par les traités, de choisir les personnes qu’ils emploient, soit à leur service personnel, soit à celui de leurs gouvernements, à moins toutefois que ce ne soient des cheikhs ou autres employés du gouvernement marocain, tels que les soldats de ligne ou de cavalerie, en dehors des Mukhazni-s préposés à leur garde. De même ils ne pourront employer aucun sujet marocain sous le coup de poursuites.
Il reste entendu que les procès civils engagés avant la protection se termineront devant les tribunaux qui en auront entamé la procédure.
L’exécution de la sentence ne rencontrera pas d’empêchement. Toutefois, l’autorité locale marocaine aura soin de communiquer immédiatement la sentence rendue à la légation, consulat ou agence consulaire dont relève le protégé.
Quant aux ex-protégés qui auraient un procès commencé avant que la protection eût cessé pour eux, leur affaire sera jugée par le tribunal qui en était saisi.
Le droit de protection ne pourra être exercé à l’égard des personnes poursuivies pour un délit ou un crime avant qu’elles n’aient été jugées par les autorités du pays, et qu’elles n’aient, s’il y a lieu, accompli leur peine.
Art. 6. — La protection s’étend sur la famille du protégé, sa demeure est respectée.
Il est entendu que la famille ne se compose que de sa femme, des enfants et des parents mineurs qui habitent sous le même toit.
La protection n’est pas héréditaire. Une seule exception, déjà établie par la convention de 1863, et qui ne saurait créer un précédent, est maintenue en faveur de la famille de Benchimol.
Cependant, si le Sultan du Maroc accordait une autre exception, chacune des puissances contractantes aurait le droit de réclamer une concession semblable.
ART. 7. — Les représentants étrangers informeront par écrit le Ministre des Affaires étrangères du choix qu’ils auront fait des employés.
Ils communiqueront chaque année au dit Ministre une liste nominative des personnes qu’ils protègent et qui sont protégées par leurs agents dans les Etats du Sultan du Maroc.
Cette liste sera transmise aux autorités locales qui ne considéreront comme protégés que ceux qui y sont inscrits.
Art. 8. — Les Agents consulaires remettront chaque année à l’autorité du pays qu’ils habitent une liste, revêtue de leur sceau, des personnes qu’ils protègent. Cette autorité la transmettra au Ministre des Affaires étrangères, afin que, si elle n’est pas conforme aux règlements, les Représentants à Tanger en soient informés.
L’Officier consulaire sera tenu d’annoncer immédiatement les changements survenus dans le personnel protégé de son consulat.
Art. 9. — Les domestiques, fermiers et autres employés indigènes des secrétaires ou interprètes indigènes ne jouissent pas de la protection. Il en est de même pour les employés ou domestiques marocains des sujets étrangers.
Toutefois les autorités locales ne pourront arrêter un employé ou un domestique d’un fonctionnaire indigène au service d’une Légation ou d’un Consulat, ou d’un sujet ou d’un protégé étranger, sans en avoir prévenu l’autorité dont il dépend.
Si un sujet marocain au service d’un sujet étranger venait à tuer quelqu’un, à le blesser ou à violer son domicile, il serait immédiatement arrêté, mais l’autorité diplomatique ou consulaire sous laquelle il est placé serait avertie sans retard.
Art. 10. — Il n’est rien changé à la situation des censaux, telle qu’elle a été établie par les traités et par la convention de 1863, sauf ce qui est stipulé, relativement aux impôts, dans l’article suivant.
Art. 11. — Le droit de propriété au Maroc est reconnu pour tous les étrangers.
L’achat de propriété devra être effectué avec le consentement préalable du gouvernement, et les titres de ces propriétés seront soumis aux formes prescrites par les lois du pays.
Toute question qui pourrait surgir sur ce droit serait décidée d’après les mêmes lois, avec l’appel du Ministre des Affaires étrangères stipulé dans le traité.
Art. 12. — Les étrangers et les protégés propriétaires ou locataires de terrains cultivés ainsi que les censaux admis à l’agriculture, payeront l’impôt agricole. Ils remettront chaque année à leur consul la note exacte de ce qu’ils possèdent, en acquittant entre ses mains le montant de l’impôt.
Celui qui fera une fausse déclaration paiera, à titre d’amende, le double de l’impôt qu’il aurait dû régulièrement verser pour les biens non déclarés. En cas de récidive, cette amende sera doublée.
La nature, le mode et la quotité de cet impôt seront l’objet d’un règlement spécial entre les représentants des puissances et le Ministre des Affaires étrangères de Sa Majesté Chérifienne.
Abt. 13. — Les étrangers, les protégés et les censaux propriétaires de bêtes de somme paieront la taxe dite « des portes ». La quotité et le mode de perception de cette taxe, commune aux étrangers et aux indigènes, seront également l’objet d’un règlement spécial entre les Beprésentants des puissances et le Ministre des Affaires étrangères de Sa Majesté Chérifienne.
La dite taxe ne peut être augmentée sans un nouvel accord avec les représentants des puissances.
ART. 14. — La médiation des interprètes, secrétaires, indigènes ou soldats des différentes légations ou consulats, lorsqu’il s’agira de personnes non placées sous la protection de la légation ou du consulat, ne sera de mise qu’autant qu’ils seront porteurs d’un documient signé par le chef de mission ou par l’autorité consulaire.
Art. 15, — Tout sujet marocain naturalisé à l’étranger, qui reviendra au Maroc, devra, après un temps de séjour égal à celui qui aura été régulièrement nécessaire pour obtenir la naturalisation, opter entre sa
soumission entière aux lois de l’Empire ou l’obligation de quitter le Maroc, à moins qu’il ne soit constaté que la naturalisation étrangère a été obtenue avec l’assentiment du Gouvernement marocain.
La naturalisation étrangère acquise jusqu’à ce jour par des sujets marocains, suivant les règles établies par les lois de chaque pays, leur est maintenue pour tous ses effets, sans restriction aucune.
Art. 16. — Aucune protection irrégulière ou officieuse ne pourra être accordée à l’avenir.
Les autorités marocaines ne reconnaîtront jamais d’autres protections, quelle que soit leur nature, que celles qui sont expressément arrêtées dans cette convention.
Cependant l’exercice du droit consuétudinaire de protection sera réservé aux seuls cas où il s’agirait de récompenser des services signalés rendus par un Marocain à une puissance étrangère, ou pour motifs tout à fait exceptionnels. La nature des services et l’intention de les récompenser seront préalablement notifiés au Ministre des Affaires Etrangères à Tanger, afin qu’il puisse, au besoin, présenter ses observations; la résolution définitive restera néanmoins réservée au gouvernement pour lequel le service aura été rendu. Le nombre des protégés ne pourra dépasser celui de douze par qui reste fixé comme maximum, à moins l’assentiment du Sultan.
Art. 17. — Le droit au traitement de la nation la plus favorisée est reconnu par le Maroc aux puissances représentées à la Conférence de Madrid