p.131 : Passion de la voiture et dédain pour la marche
Les riches, le Grands et les personnalités du pays, voire la majorité du peuple ne se déplacent guère à pied, ils vont en coche pour une double raison : de comportement condescendant, ils manifestent une grande passion pour la parade. Ils ne daignent point marcher à pied dans les rues à moins qu’ils veuillent se détendre par la promenade. De même l’immensité de la ville oblige-t-elle le recours à une moyen de transport; et pour aller d’un lieu à un autre, la marche à pied devient en l’occurrence un véritable voyage.
[…]
Il nous a fallu du temps pour nous habituer au vacarme incessant de la ville et pour retrouver le sommeil, à cause du roulage ininterrompu des voitures, même nuitamment, nous avions l’impression d’habiter sur la plage d’une mer houleuse avec son perpétuel clapotis de vagues recommencées, ou bien à côté d’un moulin qui n’arrêterait pas de tourner !
p.133 : Commerce sans marchandage
Debout devant le portail, le patron accueille les clients, leur demande ce qu’ils désirent pour les diriger vers les rayons des marchandises souhaitées , il les confie ensuite à des serviteurs qui vont leur présenter les articles pour choisir. Chaque marchandise porte son prix sur une étiquette, aussi, ni le vendeur ni l’acheteur n’éprouvent le besoin de marchander. Lorsque quelqu’un désire prendre quelque chose, le serviteur l’accompagne avec l’article choisi jusqu’à la porte et le laisse devant quatre personnes chargées de la caisse.
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Par ailleurs, il n’existe pas chez ces gens-là de Joutiya où on vend à la criée et l’on spécule comme chez nous !
p.135 : Urinoires
Dans les marchés de cette ville sont construits des sortes de petites cuves, des vespasiennes servant à uriner, avec à la porte une tige de fer à deux bords pour accrocher les vêtements et empêcher l’urine de les souiller ; ces gens-là urinent également le long des rues, au ras des murs, sans pour autant considérer cet acte comme indécent. Cependant, ils n’oublient jamais de nettoyer, de balayer et d’arroser leurs rues.
p.135 : Du concept de la promenade
Dans cette ville existent par ailleurs des lieux publics où les gens vont et viennent en guise de promenade. Leur promenade consiste, tenant la main de son camarade ou de son amie, à se diriger vers l’un de ces endroits célèbres et à aller et venir en devisant, tout en admirant le paysage. Leur promenade n’offre jamais l’occasion de manger, de boire, ni même de s’asseoir. Parmi les lieux de détente et de promenade, il y a un endroit appelé Champs Elysées […]
p.153 : Culte du travail et haine du pauvre, interdit de la mendicité
Les Parisiens sont passionnés par le profit, le gain et l’enrichissement ; les femmes ne diffèrent aucunement des hommes à ce propos; tous font preuve d’énergie, d’assiduité et de diligence incomparable dans le travail. Tu ne rencontres pas un oisif ou un chômeur, quand bien même ils possèdent les lieux les plus variés de distraction et les plus tentants. Pourtant, ils ne délaissent à aucun prix leur travail et accordent à chaque chose son temps. Les loisirs et les distractions les aident plutôt dans leurs travaux, grâce à la récupération et au délassement qu’ils procurent. Personne n’admet être pauvre car ils préfèrent la mort à la misère et le pauvre est méprisé comme vil et méprisable
[…]
p.155 : En général, ce peuple s’adonne de tout coeur au commerce et à l’industrie.
p.157 : Et comme le profit et l’enrichissement constituent leur soucis majeur, tu ne trouves chez eux ni pauvre ni mendiant. D’ailleurs, ils interdisent la mendicité et considèrent le fait de donner une aumône aux personnes capables de travailler comme une sorte d’incitation et d’encouragement à la paresse, à l’oisiveté et à la mise à mort de l’esprit d’entreprise.
p.158 : Interdiction de s’assoir
La nature des parisiens se caractérise par la célérité et l’agilité, la diligence et la mobilité d’esprit. Lorsqu’ils sont réunis, ils ne peuvent se tenir tranquille dans un endroit ; tu les vois en train de bouger et toujours en pleine vivacité et activité. Ils ne s’assoient que pour manger et se lèvent aussitôt après ; s’asseoir, pour eux, est considéré comme un défaut ! Seules les femmes peuvent s’asseoir alors que les hommes doivent rester debout, même s’il fallait rester à pied toute la nuit ; cette conduite est aussi respectée durant les fêtes et les promenades.
Celui qui désire s’asseoir ou se reposer s’isole dans une pièce réservée au délassement. Nous n’avons point vu d’hommes assis durant les nuits de festivité et de réjouissances, sauf au théâtre, et seulement pendant le moment de la représentation. Tu les vois aller et venir dans les avenues, les rues, les places et les jardins public au moment du désoeuvrement. En les voyant marcher de la sorte, on croit qu’ils ont un but précis, or ils ne visent que la conversation et la récréation. Parfois, une personne seule s’adonne à cette activité de course reposante. Ils avancent que cette manie de bouger les aide à mieux réfléchir, et partant, à exploiter toutes les facultés et les capacités de l’esprit et à rationaliser leurs déductions. Ce phénomène a été expérimenté et s’est révélé probant.
p.158-9 : Culte de l’énergie
Il est naturel chez eux d’apprécier une personne diligente et affable, de bonne mine et souriante, exubérante et aimable ; ils aiment discuter sur les sciences, de choses curieuses et extraordinaires, des moeurs des autres villes et pays… Ils ont un penchant prononcé pour une personne qui se distingue par ces qualités, et se lient rapidement avec elle, même si l’entretien se fait par l’intermédiaire d’un drogman par exemple. En revanche, ils trouvent ennuyeux une personne de tempérament opposé à ce qui précède; aussi l’évitent-ils et fuient-ils sa compagnie.
p. 159 : Duel bourgeois
La véhémence et la fougue, l’impétuosité et la fierté les distinguent. Tu les vois recourir au duel pour la moindre injure. Celui qui a été insulté ou humilié doit relever le défi, sinon il serait exposé au mépris du public et qualifié de poltron. Dans un duel ils désignent le moment et le lieu où se déroulera le combat et choisissent la nature des armes et la manière de l’opération avec tout le rituel de cet acte, sans qu’un gouverneur ou autre ne s’y oppose !
p. 160 :Propreté extérieure
Ils accordent un soin extrême à la propreté comme en témoignent leurs maisons, leurs rues, leurs magasins, leurs corps et leurs vêtements. Tu ne pourrais apercevoir quelqu’un portant des habits sales ou maculés d’ordures ; ils sont souvent habillés de vêtements neufs. Partout, dans les rues, les marchés, on voit des gens assis sur des chaises et tenant des brosses en poil, qui offrent leur service pour brosser les flanelles et les chaussures. Quand quelqu’un s’aperçoit que ses souliers ou ses habits sont empoussiérés, il s’arrête devant ces gens pour les faire nettoyer jusqu’à ce que ses chaussures reprennent leur éclat avant de payer le service rendu et de poursuivre son chemin.
[…]Et tu ne vois guère d’ordures ou de balayures dans leurs rues. Celles-ci sont balayées quotidiennement et arrosées d’eau quand il ne pleut pas. En revanche, on déplore le fait qu’ils urinent au ras des murs. Toutefois, grâce à la largeur des rues, les nuisances sont évitées. Partout tu vois la propreté régner et égayer les regards.
p.162 : Rapport aux femmes, galanterie et homophobie
Ils cultivent la poésie amooureuse et érotique mais seule la femme est l’inspiration de ces sujets et ils n’affichent point de penchant pour les adolescents et les jouvenceaux. Cet acte est considéré indécent et condamnable, à l’inverse de l’amour pour les femmes et de la retraite avec elles. En cas de consentement des deux partenaires, personne ne peut s’opposer à leur union et cela ne nuit à personne. Cependant, les deux amans qui s’adonnent à ces pratiques manquent de pudeur et de décence, surtout la femme qui sera considérée comme une dépravée. les personnes de dignité de lui adressent plus la parole, ne la saluent point, même si l’union non consacrée par le mariage est licite et permise.
A l’inverse, les femmes vertueuses jouissent d’une considération respectueuse et d’un traitement on ne peut plus galant ; l’invité dans une maison doit faire preuve de courtoisie et de galanterie envers l’hôtesse. Il faut qu’il salue en premier lieu la femme, qu’il lui parle avec affabilité et civilité et qu’il l’a cajole avec chasteté bien sûr. Ensuite, l’invité salue le mari et les autres hommes. Celui qui cherche à satisfaire une demande entre les mains d’un mari n’a qu’à s’adresser à sa femme.