Après avoir partout rétabli l’ordre, Salomon entreprit une nouvelle expédition contre Iabdas et les Maures qui habitent le mont Aurès. Gontharis, l’un de ses gardes, capitaine distingué, envoyé en avant avec une partie de l’armée, arriva au fleuve Abigas, et établit son camp non loin d’une ville déserte, nommée Bagaï. Dans ce lieu il eut un engagement avec l’ennemi, fut vaincu et forcé de se retirer dans ses retranchements, où il commençait à être étroitement bloqué pair les maures, lorsque Salomon, arrivant avec le reste de l’armée, établit son camp à soixante stades du camp de Gontharis. Il apprend dans ce lieu la défaite de ce capitaine, et il envoie, pour le secourir, une partie de ses soldats, avec ordre d’attaquer vigoureusement l’ennemi. Mais les Maures, quoiqu’ils eussent été vainqueurs, comme nous l’avons dit, eurent recours à cet artifice. L’Abigas prend sa source dans le mont Auras, et, en descendant dans la plaine, arrose les campagnes au gré des habitants, qui en dérivent les eaux selon les besoins de leurs cultures. Car cette plaine est coupée par de nombreux conduits dans lesquels le fleuve se partage, et d’où il ressort après avoir longtemps coulé sous la terre, et réuni toutes ses eaux en un seul lit. Ces dispositions existant dans la plus grande partie de la vallée, l’eau du fleuve est réellement entre les mains des habitants, qui peuvent la porter où ils veulent, en bouchant ou en ouvrant les conduits. Les Maures ayant alors fermé toutes les issues de ces canaux, dirigèrent le fleure entier contre le camp romain, qui devint tout à coup un lac profond et impraticable. Les troupes furent saisies d’épouvante, et se trouvèrent réduites aux dernières extrémités. Salomon, instruit de leur détresse, se hâte de venir à leur secours. Les Maures n’osent l’attendre; ils se retirent au pied de l’Aurès, et s’y retranchent dans un lieu qu’ils appellent Babosis. Salomon les y poursuit, leur livre bataille avec toutes ses forces, les bat complètement et les met en déroute. Les Maures, après cette défaite, renoncèrent à disputer la victoire aux Romains en bataille rangée. Ils comptaient que la nature abrupte et escarpée de l’Aurès, et les fatigues d’une poursuite à travers ces obstacles, contraindraient bientôt les Romains à se retirer, comme cela était arrivé dans leur première expédition. Dans cette persuasion, une partie des Maures se retira dans la Mauritanie (Sitifensienne) et chez les barbares qui habitent au sud de l’Auras. Iabdas resta dans ces montagnes à la tête de 20 000 hommes, et s’enferma avec eux dans une place forte nommée Zerbulé, qu’il y avait bâtie. Salomon, au lieu de perdre son temps à l’assiéger, se porte, aussitôt que les grains soit mûrs, sur la ville de Tamugadis, y fait entrer son armée, et de là ravage les campagnes. Après avoir tout dévasté par le fer et par le feu, il revient contre le fort de Zerbulé.