Les Maures sont dans l’usage de marier leurs Noirs avec leurs Négresses et, après quelque temps de service, ils leur donnent la liberté ; on voit par-là que les peuples cultivateurs sont plus humains envers leurs esclaves que les peuples commerçants, et que les Noirs sont plus heureux chez ce qu’il nous plaît d’appeler nations barbares, qu’ils ne le sont dans nos colonies. Les Maures, sans les maltraiter, les occupent à la garde de leurs troupeaux, au travail des terres, et au service de la maison, pour un temps limité; ils dépeuplent une partie de l’Afrique pour en peupler une autre; l’Europe, au contraire, dévaste l’ Afrique pour avoir du sucre, du café, pour se procurer des jouissances arrosées du sang & des larmes des humains. Elle sacrifie, à des besoins de convention, des générations entières, auxquelles nous tenons par les liens de l’humanité, & dont nous ne sommes éloignés que par la couleur ; comme si une nuance de plus ou de moins, sur la peau devait déterminer l’idée réciproque, que nous avons de nous-même.