« A mon très excellent et bienheureux Seigneur, au pieux Kumitas, archevêque et métropolite du pays d’Arménie, Modestos, humble prêtre et vicaire de Jérusalem.
« […]
Or, comme il (Dieu) a changé en amis nos adversaires et qu’il nous à accordé sa pitié et sa miséricorde, devant tous nos tyrans, les meurtriers du Seigneur et les Juifs, qui pensaient, en torturant celui-ci, outrager une fois encore celui qui fut torturé pour nous, Notre-Seigneur Jésus le Messie, notre vrai Dieu ; eux qui ont osé faire la guerre et qui ont brûlé cette place véritable, la clémence de Dieu a bien voulu les bannir de sa sainte ville de Jérusalem ; eux qui désiraient s’en rendre les habitants, ils entendent [l’ordre] de ne plus y demeurer ; ils ne sont pas jugés dignes de voir la passion vénérable et adorable, ni le tombeau saint et qui a enfermé la vie, ni le saint Golgotha, glorieusement renouvelé.
[Car toutes ces choses] voient que leur gloire leur est rendue, ainsi que l’office divin dans tout son éclat, et Sion, la mère des Eglises, qui est réédifiée. En apprenant que tous ces endroits adorables sont restaurés, ils enragent de jalousie, non de la bonne jalousie, mais de la jalousie innée de leur ancêtre Caïn.
Ils demandèrent à plusieurs reprises, en faisant de grands cadeaux, la permission de rentrer dans la ville sainte ; mais ils n’en ont pas été jugés dignes, empêchés par Dieu, qui nous a châtiés, non pas selon nos œuvres, mais par sa charité paternelle, afin de nous régénérer.
« Mais en t’écrivant [cette chose] miraculeuse, nous te causons de la joie ; la reconstruction de ces lieux adorables a lieu non par l’injustice ou par la ruine, mais grâce à sa miséricorde, par laquelle il a sauvé le monde et [nous] a accordé la connaissance de lui-même.
« Or, ainsi qu’on te l’a dit, grâce à Dieu, par l’intermédiaire de vos saintes prières, toutes les églises de Jérusalem ont été réorganisées et on y célèbre le culte ; la paix [règne] dans cette ville divine et aux alentours, comme on vous le dira personnellement, et comme l’ont vu vos hommes pieux. Tout cela est l’œuvre du même créateur […] il vous rappellera de prier sans cesse pour nous et de ne jamais manquer à penser [à nous] et veiller sur nous et sur les pauvres de Jérusalem, à accomplir tout ce qui est nécessaire, et, si c’est possible, à faire converger votre amour jaloux pour Dieu vers l’assistance [requise] pour la construction du [Temple] de la Passion vivifiante ; afin que nous soyons gratifiés de ces présents, bons et désirables. Je prie aussi votre Sainteté paternelle de lire cette missive devant les saints évêques qui sont avec vous. »
Voici la réponse à cette lettre, que les Arméniens à Jérusalem écrivirent à Modestos :
“La voix annonciatrice de la grande trompette de l’ange nous crie à travers cette lettre arrivée de votre cité divine, nous annonçant une grande joie ; les cieux se réjouiront et la terre sera en liesse ; l’Eglise en sa gloire et ses enfants seront dans la joie ; et maintenant nous tous, d’une clameur unanime, nous entonnerons le Magnificat angélique, en disant : Gloire à Dieu dans les hauteurs, paix sur la terre et bonne volonté parmi les hommes. »
RÉPONSE DE St KUMITAS.
« Par la grâce de Dieu, de ma part, à moi, chef des évêques, et de la part de tous les évêques orthodoxes, des prêtres, des diacres, des scribes et de tout le peuple arménien, à vous qui avez été persécutés et affligés, frappés de verges, éprouvés, et qui êtes protégés et choyés, consolés et aimés par le Père céleste.
« A toi, excellent frère Modestos et à toutes les églises de Jérusalem, que la grâce de Notre-Seigneur Jésus le Messie , que l’amour de Dieu et la paix soient multipliés.[236]
« D’abord je rends grâce à Dieu pour les consolations dont il nous a consolés, pour que vous-mêmes vous puissiez consoler ceux qui sont dans les peines : car voici que nous-même, par votre consolation qui nous est parvenue, nous avons été consolés de beaucoup de chagrins et de peines violentes, et des tortures amères qui nous affligent.
Mais Dieu est fidèle, qui, par sa clémence paternelle a soulagé tous les troupeaux des croyants de cette façon et nous a fait oublier notre tristesse par la joie de cette nouvelle et par le bruit de la réédification et de la pacification de Jérusalem.
« Mais le prophète nous crie, nous clame et dit:
« Consolez-vous; que mon peuple soit consolé, dit Dieu; prêtres, parlez au cœur de Jérusalem et consolez-la, car elle fut pleine de souffrance. »
Dieu s’approche de vous comme de ses fils; car le Seigneur éprouve celui qu’il aime.[240] Quel père ne conseillera pas son fils ? Nous avons été guéris par ses blessures[241] et le conseil de notre paix [est] en lui.
Mais sache toi-même ceci, ô frère bien-aimé.
Ces voyages provoquaient une consolation non moindre chez notre peuple aussi,
-d’abord parce qu’ils oubliaient les douleurs et la tristesse de notre pays
-2° parce qu’ils lavaient leurs péchés par la pénitence, le jeûne et la charité, en accomplissant ce voyage pénible, sans sommeiller, nuit et jour
-3° parce que [les pèlerins] baptisaient leurs corps dans l’eau de sainteté, dans les tourbillons enflammés du Jourdain qui a jailli sur tout l’univers, en grâce divine. Car ils répandaient l’angoisse de leur cœur autour du mont Sinaï, proche de Dieu au temps de Moïse, se [disant] l’un à l’autre la parole du prophète :
« Venez, montons sur la montagne du Seigneur et dans la maison du Dieu de Jacob.”
[…Apocalypse]
« Mais notre bien-aimé nous a déjà dit tout cela, en racontant [comment celui qui] descendait de Sion à Jéricho tomba entre les mains des brigands qui le dépouillèrent et, l’ayant chargé de blessures, le laissèrent à moitié mort et partirent; [comment] les prêtres qui voyageaient le virent et passèrent outre ; [comment] les juifs, les lévites et les païens le virent et passèrent outre ; tandis que lui-même s’approcha avec compassion, banda ses blessures, appliqua sur celles-ci sa miséricorde et son sang vivifiant ; il manda de mettre sur [les blessures] de l’huile et du vin et de les bander, pour les guérir ; et voici qu’on vit [le blessé] conduit à l’auberge et soigné ; il donna 3 piastres à l’aubergiste. Voici, tu as en main largement pour les remèdes. Tout ce que tu dépenseras pour cet homme, il te le rendra quand il reviendra une autre fois.
« Que Sion ne se lamente plus désormais et que Jérusalem ne se revête plus de deuil, car voici que Messie-Roi est arrivé pour sauver et consoler ; la couronne de ta consolation sera arrondie avec sa passion fleurie, et sa mort sera un diadème de consolation sur ta tête. Les fils méchants des Juifs se rongeaient et se consumaient, ô très cher, car les arbres du Christ qu’ils ont coupés avec les haches de leur fureur par la main de bûcherons insensés, voici qu’ils ont poussé des rejetons et qu’ils se sont multipliés. Le Très Haut a rempli ces [endroits] d’oliviers et de palmiers, que les enfants de ceux qui ont crucifié ne seront pas même jugés dignes de voir.”
[…]