Burckhardt, Route du Hajj (Jordanie), v. 1810

 

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La route du Hajj de Damas à la Mecque a changé à 3 reprises, passé tout d’abord par le côté E du Jabal Hawran, par peur des Arabes, les pashas préférèrent finalement l’itinéraire à travers la Laja et Busra, à partir des années 1780, le présent itinéraire fut édicté :

1er. jour. Le Amir Al Hajj quitte la cité vers la mi-journée, et reste la nuit à Qubbat al-Hajj al-‘Azali, une ancienne mosquée à un quart d’heure de Bab al-Ulla, la porte sud de Damas. Près de la Qubba se trouve le village de Qâdim.

2. À 4 heures, c’est le village de Qiswa, avec un bazar bien fourni. A 1 heure, le Khân Danûn situé sur la rivière ‘Awaj, qui vient de Hasbaya et se jette dans la Ghûta de Damas. Le Khân est en ruines. A un quart d’heure au S.E. se trouve le village de Khyara.

3. 4 heures de Danûn est le village de Ghabâ’ib, il possède un petit Khân à la gauche de la route du Hajj, à sa droite se trouve une Birka ou réservoir d’eau, qui est alimentée par la rivière Shaqhab (شقهب) , dont la source, ‘se trouve près du village du même nom, au N-W de Ghabâ’ib. Les barbiers de Damas y recueillent des sangsues (‘Âliq), Le Shaqhab se perd dans la plaine du Hawran, après avoir arrosé les jardins et les champs de Dourra Ghabâ’ib. 3 heures plus loin du village Dîdy, 1 heure de plus : les ruines d’une bourgade et le château de Aç-Cannamayn, où il ya 2 tours de pierre noire. Les fellahs y ont quelques maisons. 1,5 heure plus loin : une colline avec une petite Birka à son pied, appelé Al-Faqi‘, comprennant une source qui se perd dans la plaine de l’E. Le Hajj y passe parfois la nuit, et parfois à Cannamayn.

4. A 4 heures de Cannamayn est une colline Tall Dillî, avec un village en ruine au sommet. A ses pieds coule une rivière dont la source se trouve à Tall Sirrâya, une colline à2 heures à l’W., de même avec un village en ruine. On y trouve un petit moulin en fonction. En hiver et au printemps le district de Dillî est marécageux; 4 heures plus loin est un village appelé Shams-Kayn, d’une taille considérable, et dans un état prospère. 3 heures plus loin, Tafs, un village, ruiné par les Wahhabites en Juin 1810. Une heure plus loin Al Mazârayb, avec un château de taille moyenne, le plus important du Hawran avant Busra.

5. A 1 heure de Mazârayb est le Wadi al-Midân (المدان), qui vient du Jabal Hawran. En hiver, elle met souvent en difficultés les Hajji. Jazzar Pasha y ordonna donc la construction d’un pont. Le sol est fait de fin gravier, même en été, lorsque le Wady est sec, l’eau se trouve partout sous le sol, à 2 ou 3 aunes de profondeurs. A 3 heures : le village Ar-Ramthâ, habité par des fellahs, qui ont une dizaine de citernes d’eau de pluie, et une petite Birka dans le quartier du village. La plupart vivent dans des cavernes aménagés dans une roche blanche. Le Shaykh de Ramtha est généralement un Santon, qui tire sa dignité d’être dans la famille des Az-Za‘abî (الزعبي), et possède là une mosquée à son nom. En raison de la sainteté de sa famille, le Pasha ne prend pas de Miri de ce Shaykh. Les Hajji dorment parfois à Ramtha, d’autres fois ils se rendent à Fadayn, appelé aussi Mafraq, un château à 4 heures de Ramtha, où le Pasha entretient une petite garnison, sous les ordres d’un Aga, ou Oda-Bashi. Les Arabes du Balqa ont l’habitude de déposer dans le château de Fadayn leurs provisions superflues de blé et d’orge, qu’ils récupèrent l’année suivante, ou les vendent au Hajj, après avoir payé à l’Aga un émolument. De Dafayn commence un petit Wadi qui devient, à une journée de marche, le W. Butûn et le Jabal Haysh qui continue son chemin vers le S et l’W. de la route, devient au niveau deFadayn le Jabal Balqa‘. A l’E de Fadayn se termine le Jabal Hawran, non loin au nord de Busra. A 1 journée de marche de l’endroit où se finissent les montagnes se trouve le village de çalkhat. De Fadayn vers le S-E, la plaine est inculte, et sans habitations.

6. La Qala‘at Zarqa‘ se trouve à 1journée de Fadayn. Le Hajj se repose 1 jour, les Hajji en profitent pour se divertir à la chasse au sanglier qui s’y trouvent en grand nombre dans les roseaux du W. Zarqa‘. Le château est construit dans un Wad de peu d’intensité qui se transforme en hiver en un torrent impétueux, appelé Nahr Az-Zarqa‘, dont les eaux aboutissent au S du J. Hawran. A l’W se toruvent des sources, la rivière n’est de ce fait jamais complètement asséchée. Il pénètre ensuite dans le J. Balqa‘ et se jette dans al-Sharyat-al-Kabir. Le Pasha de Damas a un Aga dans le château, qui est toujours un Arabe de la tribu de Ahtaym, une partie d’entre eux vivent sous la tente autour du château et cultivent ses terres. Ils produisent beaucoup de raisins, de dourra et de blé.

7. A 1 journée se trouve la Qala‘at al-Balqa‘. Le nom de Qala‘a, est ainsi attribué, ur la route du Hajj, et dans la majeure partie du désert, à un bâtiment muré et couvert, et ayant, comme un Khân, une grande cour-jardin dans son enceinte. Les murs sont parfois de pierre, mais le plus souvent de la terre, mais suffisants pour résister à une attaque d’Arabes. Le château de Balqa‘ a une grande Birka d’eau de pluie. Son commandant ou Oda-Bashi est toujours choisi parmi les Janissaires de Damas. Il sert les Arabes du J. Balqa‘ de grenier pour leurs provisions. A l’W de ce château s’achève le J. Balqa‘. Les Arabes yvivent sous la tente tout autour et sont Fellah.

8. A 1 journée de marche de celle-ci est la Qala‘at al-Qatrâna, dont l’Oda-Bashi est également un janissaire de Damas. Il a une Birka des eaux de pluie. A 1 journée de marche au N.W. de celui-ci est la Qala‘a de Karak, où les Arabes apportent leur blés pour le vendre à l’Odabashi de Qatrâna, qui le revend avec une marge aux Hajji.

9. 1 journée, se trouve Q. Al-Hasâ, avec une source claire, dont l’eau est extraite par une grande roue. Le château est construit au milieu du W. , en hiver une rivière emprunte l’W. qui est à sec en été, mais à 1/4 d’heure à l’W du château se trouvent plusieurs sources d’eau claire qui ne tarissent jamais. Elles versent dans une rivière qui se jette à son tour dans la Sharyat-al-Kabîr à 2 journées de là. Les fellahs qui vivent autour du château dans le W, dans plusieurs petits villages, cultivent le dûrra et l’orge, ceux qui vivent sur les montagnes de l’W, cultivent pour leurs maîtres, les Arabes Al-Hajâya, et eurs remettent la moitié de la récolte en retour. Au S-E, au N du W, à environ 5 heures de distance, se situe une haute colline, appelée Shihâq, qui est visible de Masn et de ‘Aqaba. A la même distance à l’E. se trouve un point d’eau appelé Masas-al-Rukbân, à une courte profondeur. A l’E du W, dans le J. Shara se trouve la bourgade de Tafîla. Au sud, la Shqra se divise en 4 ou 5 branches, et embrasse l’ensemble du pays jusqu’au J. Tur. A 2 journées d’Al-Hassa, on trouve une route qui longe le sommet de la montagne vers Gaza; et appelée ‘Aqaba, ou plus fréquemment AdDuhal, très fréquenté par les gens de Tafîla et les Arabes Tuhayla.

10. ½ journée est Q ‘Anaza, avec une Birka d’eau de pluie.

11. ½ journée : Q Ma‘ân , où les Hajji s’arrêtent 2 durant. Ma‘ân a beaucoup d’eau. La ville se compose d’une centaine de maisons des deux côtés de la route, qui coupe la ville, la partie E est appelée Shâmiya, et l’W Ma‘ân. Les habitants cultivent figues, grenades, et prunes en grandes quantités, mais pas les champs. Ils achètent donc le blé de Karak, que leurs femmes moudent, et revendent au passage des pèlerins, ainsi que leurs fruits, ce qui est un moyen de subsistance non négligeable. Ils achètent des articles de toilette de luxe de Gaza et Al-Khalil.

12. 1 longue journée vers le château de ‘Aqaba Ash-Shâmiya par opposition à la ‘Aqaba égyptienne, sur la branche Est de la Mer-Rouge, à une journée de marche de là; on y trouve une Birka d’eau de pluie. La route des pèlerins, au niveau de ‘Aqaba, est un désert intégral de tous côtés, mais pas inaptes à la culture. La chaîne de montagne se poursuit sur une dizaine d’heures à l’W de la route. ‘Aqaba est aux mains des Arabes Al-Huwaytât , qui sont en communication avec Le Caire. Au pied du château se trouve un gouffre profond, et il faut une demi-heure pour atteindre la plaine. Par crainte, les pèlerins répétent cette prière avant de descendre, “Que le Dieu Tout-Puissant ait pitié de ceux qui descendent dans le ventre du dragon” . La montagne est composée d’un roc de sable rouge gris, utilisé à Damas comme pierre à aiguiser. […]Lorsque les pèlerins atteignent le bas de la pente, ils font feu de leurs armes pour entendre l’écho qui se perd à une grande distance dans la plainesablonneuse