Il ne faut pas oublier que dans ce que je viens de rapporter des Mandingues je n’ai entendu parler que de ceux qui sont libres et qui forment tout au plus le quart des habitants de ces contrées. Les autres trois quarts sont nés dans l’esclavage, et n’ont aucune espérance d’en sortir. Ils cultivent la terre, ils soignent le bétail, et sont chargés de tous les travaux serviles, de même que les Nègres des colonies des Indes occidentales.
Cependant le Mandingue libre n’a pas le droit d’ôter la vie à son esclave, ni même de le vendre à un étranger, à moins qu’il n’ait fait juger publiquement par un palaver, si l’esclave mérite d’être puni. Les seuls esclaves nés dans le pays ont le privilège de pouvoir invoquer les lois pour ne pas en sortir. Les prisonniers de guerre, les malheureux condamnés à l’esclavage pour avoir commis quelque crime, ou pour dettes, et tous les infortunés qu’on tire du centre de l’Afrique et qu’on vient vendre sur la côte, n’ont aucun droit de réclamer contre les injustices de leurs maîtres, qui peuvent les traiter et en disposer à leur fantaisie.
Il arrive quelquefois que, lorsqu’il n’y a point sur la côte des navires européens, un maître indulgent et généreux admet au nombre de ses domestiques les esclaves qu’il avait achetés pour revendre. Dès lors, les enfants de ces esclaves jouissent des mêmes privilèges que ceux qui sont nés dans le pays.