Mais le dragon rebelle ne s’arrêta pas; il voulut avec sa ruse combattre Dieu ; il s’efforçait de susciter des persécutions contre les églises d’Arménie. Car sous le roi Constantin, petit-fils d’Héraclius, il mit en œuvre la ruse de sa méchanceté, il prit pour satellites les soldats qui étaient dans le pays des Romains. Car les Arméniens n’acceptaient jamais de communier avec les Romains au corps et au sang du Seigneur. Et voici qu’ils écrivent une accusation à Constantin, l’empereur des Grecs et au patriarche :
« Nous sommes considérés comme des impies dans ce pays ; car ils considèrent le concile de Chalcédoine et le Tumar de Léon comme des outrages au Dieu Christ et ils les anathématisent. »
Alors le roi, d’accord avec le patriarche, donna un ordre et on écrivit un décret aux Arméniens pour qu’ils fissent union de la foi avec les Romains et qu’ils ne repoussassent pas ce concile et ce tumar. Il se trouvait là un homme du village de Bagrawan qui avait étudié l’art de la philosophie et dont le nom était Dawith ; il donna l’ordre de l’envoyer en Arménie pour y faire cesser l’antagonisme.
Tous les évêques et les Nakharars des Arméniens se réunirent à Dwin auprès du Katholikos christophile Nersès et du pieux général arménien, Théodoros, seigneur des Rshtuni (Van). Ils virent les ordres du roi et ils entendirent les paroles du philosophe, qui enseignait la Trinité, d’après la décision du Tumar de Léon. Et après l’avoir entendu, ils ne consentirent pas à changer la véritable doctrine de saint Grégoire, selon le Tumar de Léon. Il semble convenable à tous de répondre à la lettre [de l’empereur].
Texte de la réponse à la lettre arrivée en Arménie de la part de Constantin, empereur des Grecs, qu’ont écrite les évêques d’Arménie et le catholicos Nersès, de concert avec les Nakharars et le général Théodoros, seigneur des Rshtuni (Van).
Véritable et orthodoxe lettre nicéenne.
Je te prie, lis cela, toi qui as la foi chrétienne, ô [homme] pieux!
Nous avons le commandement des prophètes inspirés et des apôtres du Christ, de faire des prières pour ton pieux royaume et tous [tes] princes et soldats, et pour tout ton palais gardé par Dieu, où repose l’amour divin et où se montre la grâce des faveurs divines sur vous.
Car voici un royaume plus grand et plus puissant que tous les royaumes, couronné non par la main des hommes, mais par la droite de Dieu, que personne ne pourra remplacer, hormis le royaume du Christ; [il en est] de même du saint patriarcat, par la grâce de Dieu.
Naxarars et soldats christophiles, nous aussi, fiers de la splendeur de [ton] pieux royaume, nous sommes restés inébranlables au milieu des méchants et impies rois perses, lorsqu’ils ont supprimé le royaume et qu’ils ont fait périr toutes les troupes de l’Arménie, et qu’ils ont emmené en captivité les hommes et les femmes, et que, mettant et faisant briller leur épée sur ceux qui restaient, ils ont tenté de les induire en erreur, mais n’ont pu les ébranler: « Les impies ont eu honte aussi dans leur vanité ». Jusqu’à ce que le roi Kawat et son fils Khosrow donnèrent l’ordre suivant : que chacun garde sa foi et que personne ne se permette plus de vexer les Arméniens; car ils sont tous nos serviteurs de corps; mais pour les âmes, cela regarde celui qui juge l’âme. Ensuite Khosrow fils d’Ormizd, après la captivité de Jérusalem, donna l’ordre à tous les évêques de la région d’Orient et d’Asorestan de se réunir à la Porte royale et il dit: « J’entends qu’il y a deux partis parmi les chrétiens, et l’un anathématise l’autre; qu’est-ce qu’ils jugent comme étant le juste? Or, qu’ils se réunissent tous à la Porte royale pour qu’ils confirment ce qui est droit et qu’ils repoussent ce qui est faux. » Tous les évêques et les prêtres, et tous les fidèles de cette région se réunirent, et il mit sur eux comme ostikan Smbat Bagratuni, surnommé Khosrow Chnum, et le médecin en chef de la cour. Il y avait aussi là, parmi les captifs, le patriarche Zacharie de Jérusalem, et de nombreux autres philosophes, qu’il avait faits prisonniers dans la ville d’Alexandrie; le roi Khosrow leur donna l’ordre d’examiner en toute justice et de faire connaître la vérité au roi. Tous se réunirent dans le dahlitch royal, et il y eut du bruit; car quelques-uns étaient de la foi orthodoxe, selon l’écrit et le sceau des anciens rois; d’autres, nestoriens; puis, toutes sortes de gens. Le patriarche lui-même s’avança et dit: « Cet homme ne sera pas appelé Dieu. » Et on fit connaître ces paroles au roi.
Le roi répondit et dit : « Sur l’ordre de qui est-il venu en cet endroit? Or, qu’il soit battu de verges et qu’il s’en aille »; de même, il donna l’ordre de faire sortir du tribunal de nombreuses autres sectes; il ordonna d’examiner seulement [les doctrines de] Nicée, de Constantinople, d’Ephèse et de Chalcédoine. Il y avait là deux évêques d’Arménie, hommes fidèles, qui avaient été envoyés pour instruire le roi de la tyrannie qui pesait sur le pays, Kumitas, évêque des Mamikoniens (Arméniens Occidentaux) et Matthêos [évêque des] Amatunis. Ils avaient avec eux l’écrit de saint Grégoire. Le roi donna l’ordre de demander : « Sous quels rois ces conciles ont-ils eu lieu? » ils répondirent: « Le concile de Nicée s’est réuni sous Constantin; celui de Constantinople sous Théodose le Grand; celui d’Ephèse sous Théodose le Petit; celui de Chalcédoine sous Marcien. » Le roi répondit et dit: « Les ordres de trois rois semblent être plus vrais que ceux d’un seul ». Et le roi ayant appris qui était Nestorius, d’où il était, à quel concile [il avait pris part] et ce qu’il avait dit, ordonna de faire sortir du tribunal les Nestoriens. De même il demanda pour le concile de Chalcédoine : « Qui étaient les chefs? » On lui fit connaître et on lui dit que, à Nicée et à Constantinople, c’étaient les rois eux-mêmes, Constantin et Théodose le Grand; à Ephèse, c’était Cyrille, l’évêque d’Alexandrie, et à Chalcédoine, l’évêque Theodoretos, qui partageait les idées de Nestorius.
Il y avait là le catholicos Eran, et d’autres évêques de l’Asorestan, de l’Aruastan, du Xuzastan et d’autres pays; le roi Khosrow donna l’ordre de démolir toutes leurs églises et de les passer tous au fil de l’épée, s’ils ne se détournaient de l’erreur; et s’ils ne suivaient la route royale… Tenaient le parti de Chalcédoine le catholicos de Géorgie et d’Albanie avec beaucoup d’évêques de la région grecque et des chefs qui étaient venus au service du roi de Perse; il leur fit offrir la discussion. Il demanda un rapport des deux partis, sur le concile de Nicée sous Constantin, sur celui de Constantinople sous Théodose le Grand, sur celui d’Ephèse sous Théodose le Petit et sur celui de Chalcédoine sous Marcien pour examiner tout et le bien approfondir. Lorsqu’il connut tout exactement et qu’il en eut une idée véritable, il les interrogea et dit: « Ces trois-là, pourquoi n’ont-ils pas dit: deux natures séparées, comme celui-ci. Il est évident qu’il faut nous diviser nous-mêmes en deux, et dire qu’il y a deux rois, et non pas un. Car moi-même, je suis de deux natures, et de père et de mère, et d’âme et de corps. Mais si la divinité n’est pas partout, et si elle ne peut pas devenir ou faire tout ce qu’elle veut, qu’est la divinité? » Puis il donna l’ordre d’interroger Zacharie, patriarche de Jérusalem, et le philosophe d’Alexandrie, avec promesse de dire la vérité sous serment ils répondirent et dirent : « Si nous n’avions pas dévié de Dieu, il n’aurait pas lui-même avec colère dévié de nous; mais maintenant craignant Dieu, nous dirons la vérité devant vous: La foi véritable est celle qu’on a proclamée à Nicée sous le bienheureux Constantin, et celle de Constantinople et d’Ephèse, d’accord avec elle; et, d’accord avec elle, la foi véritable des Arméniens. Quant à ce qui a été dit en Chalcédoine, cela n’est pas d’accord avec elle, comme Votre Bienfaisance le sait. » Le roi ordonna de chercher dans le trésor et on trouva la véritable foi de Nicée, écrite, et il examina la concordance avec la foi des Arméniens, qui était scellée avec l’anneau du roi Kawat et de son fils Khosrow; sur quoi le roi Khosrow donna l’ordre suivant: « Que tous les chrétiens qui sont sous mon pouvoir aient la foi des Arméniens. Et de même ceux qui ont la même foi que les Arméniens dans les régions de l’Asorestan, Kamyisov le métropolite et dix autres évêques, et la pieuse reine Chirin, et le brave Smbat et le grand médecin en chef. » Le roi Khosrow ordonna de sceller un exemplaire de la confession véritable avec son anneau et de le mettre dans le trésor royal.
Et maintenant, puisque Dieu, nous a fait sortir du service du pouvoir des ténèbres et nous a accordé [de faire partie de] votre royaume de la cité céleste, avec combien plus d’ardeur ne devons-nous pas demander au Christ-Dieu de conserver éternellement inébranlable votre royaume pieux et ami de Dieu et qu’il [jouisse] comme des jours du ciel sur la terre avec de nombreuses victoires, dominant sur tout l’univers, sur mer et sur terre; bien que par le corps vous soyez de la race humaine, vous prenez place au rang divin, et la lumière glorieuse de votre pieux royaume remplit tout sur la terre; vous qui êtes couronné par le ciel, vous l’objet de la gloire de tous les chrétiens, par la puissance du signe de la Croix divine, [vous] qui ressemblez à votre père le bienheureux Héraclius, qui aimait Dieu, qui adorait Dieu, que Dieu a béni, le brave, le victorieux, le libérateur. Et maintenant que le Dieu Christ [t’] accorde la même faveur par l’entremise de ta piété.
Au sujet de l’union de la foi, nous avons reçu l’ordre d’examiner la question, et le rescrit touchant la piété de la confession nous a été envoyé à nous, indignes serviteurs. En le voyant, nous nous sommes prosternés, et avec grande allégresse, nous avons glorifié le Christ et nous avons béni le bienfait. Et maintenant, voici comment nous avons appris la vérité de la foi. L’évangéliste Jean dit: « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu et le Verbe était Dieu. » Et le même [Jean] dit encore dans son [épître] catholique: « Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la parole de vie », « Voici le Verbe a été fait chair », « et la vie a été manifestée, et nous avons vu, et nous rendons témoignage, et nous vous annonçons la vie éternelle, qui était avec le Père et qui s’est manifestée à nous ». Le même Jean dit dans l’évangile : « Personne n’a vu Dieu. » Et Paul dit: « Celui que personne parmi les hommes n’a vu et ne peut voir. » Or, pourquoi dit-il que « nous l’avons vu de nos propres yeux » et « celui que nous avons vu et que nos mains ont touché fut le Verbe de la vie » , et « celui qui était auprès du Père et qui nous est apparu », celui-là très terrible, comme cela convient aussi selon la divinité; et celui-ci très humble et très charitable, selon la nature humaine. Mais il est évident qu’il raconte l’incarnation de jeu, comme le Verbe du Seigneur raconte que « celui qui m’a vu a vu le Père ». Il a dit : me, comme un, et non pas nous comme deux. Là il parlait seulement de la divinité : « Celui qui seul a l’immortalité et qui demeure dans la lumière terrible et inaccessible ». Et maintenant [il parle] de l’humanité et de la divinité; car l’invisible ne paraissait pas; mais dans le visible on voyait l’invisible; dans le visible, la paternelle nature divine et la maternelle nature humaine; car la nature du père s’est unie à la nature humaine, en une unité immuable. Et [ainsi] il est né d’une seule nature [à la fois] Dieu et homme, comme la lumière. L’apôtre de Tarse raconte : « Dieu, dit-il, est un, et un l’intermédiaire entre Dieu et les hommes ». « Or il n’y a pas d’intermédiaire d’un seul. » Car l’union ne se fait qu’entre deux: comme d’Abraham et de Sara ensemble naquit Isaac; ainsi le Christ est né de l’Esprit saint et de Marie, avec une nature une, d’une imité non mêlée et non confondue, indicible, selon Dieu, [en tant qu’il vient] du Père, car la virginité [de la mère] n’a pas été brisée.
Or le Seigneur Jésus-Christ, Dieu et homme, est un, vie suspendue au bois sous les yeux [de tout le monde], par les meurtrissures duquel nous avons été tous guéris, selon la voix du premier prophète. Ainsi le bienheureux Jean raconte l’union dans son [épître] catholique, en disant: « C’est celui qui est venu avec l’eau et avec l’esprit et avec le sang, lui Jésus-Christ; non seulement avec l’eau, mais avec le sang et l’eau; et c’est l’Esprit qui rend témoignage, car l’Esprit est la vérité. Car ils sont trois qui rendent témoignage : l’Esprit, l’eau et le sang; et ces trois sont un.
Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est d’un plus grand poids, [et c’est le témoignage] qu’il a rendu de son fils ». Or « c’est ici mon fils bien-aimé, en qui j’ai mis mon affection; écoutez-le ». Il n’a pas divisé eu deux natures, en deux personnes et en deux esprits; mais en disant: c’est celui-ci, il a révélé l’union. C’est ce qu’exprime le même évangéliste, en disant : « L’Esprit, l’eau et le sang; tous les trois sont un. »
Ailleurs, il dit: « Et le sang de Jésus son fils nous lave de tous les péchés” . Voici que Jésus-Christ est fils de Dieu et fils de l’homme, et tous les deux ensemble [sont] une seule nature. Or il est évident à tous que la divinité est incorporelle et immortelle; mais ce qui est plus merveilleux et plus bienfaisant, plus admirable et symbolisant plus de miséricorde, c’est que l’incorporel s’est incarné et que l’invisible est devenu visible; l’impalpable, palpable; l’éternel a eu un commencement, le fils de Dieu est devenu fils de l’homme et a mêlé son humanité à sa divinité. Or, au sujet de son abaissement jusqu’à la mort et à la mort sur la croix, l’apôtre de Dieu dit: « Alors que nous étions des ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son fils. » Et il dit encore : « Qui n’a pas épargné son fils, mais l’a livré pour nous tous ». Et encore: « Si [la sagesse de Dieu] avait été connue, on n’aurait pas crucifié le seigneur de gloire ». Et encore: « Dieu envoya son fils sous la ressemblance du corps pécheur, et pour les péchés [du monde] il a condamné les péchés dans ce corps-là. » Que veut dire : il a condamné? Cela signifie qu’il a vaincu celui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable. Et comme aux serviteurs de la vigne, le Seigneur dira : « Comme la saison des fruits était proche, il envoya ses serviteurs vers les vignerons pour recevoir les fruits de la [vigne]. Mais les vignerons, s’étant saisis de ses serviteurs, battirent les uns, maltraitèrent les autres et en tuèrent d’autres. Enfin il envoya son fils, disant : ils auront du respect pour mon fils. Mais lorsque les vignerons virent le fils, ils disent Celui-ci est l’héritier; venez, tuons-le, et l’héritage sera à nous. Et l’ayant mis hors de la vigne, ils le tuèrent. » Or non seulement le Verbe est fils de Dieu, mais, est Verbe et corps, et le corps [est] ensemble avec le Verbe; car bien que le corps soit homme, il est aussi Dieu. Or ceux qui, dès le commencement, ont été témoins oculaires et serviteurs du Verbe, ont enseigné évidemment à leurs disciples, et ceux-ci encore ont enseigné la même chose à leurs disciples, puis ils ont établi la même tradition par l’Ecriture. Et beaucoup parmi les apôtres ont reçu l’imposition des mains épiscopale, comme Yustianos, Enauklitos et Klementos à Rome; Ananias à Alexandrie; Chmawon (Siméon) Klêovpeanch à Jérusalem; Dionêsios Arispagachi à Athènes; et l’autre Dionêsios à Corinthe; et l’antre Timotheos à Ephèse; et Titos en Crète; Polikarpos à Smyrne d’Asie, et Ewodia, qui est Pierre, à Antioche; Erenios de Gaulée, disciple de Polikarpos dans l’église des Laodicéens; et d’autres, innombrable multitude d’admirables évêques, de prêtres et d’orateurs inspirés, de philosophes et d’admirables fils de l’Eglise, qui ont gravé par écrit, sur chaque église, selon la voix apostolique, la véritable foi de l’Eglise. Il est connu par le concile de Nicée que tous ceux-là étaient pleinement des disciples, qui ont reçu des apôtres et ont établi la même chose à Nicée. Car ils ont dit du fils: « Même nature avec le Père, par lequel tout fut créé dans le ciel et sur la terre, qui, pour nous, devint homme et pour notre salut. » Ainsi encore saint Grégoire nous a prêché ce qu’il avait appris de ses prédécesseurs : « Ceux qui ont cru au corps, il leur a fait connaître sa divinité, et ceux qui n’ont pas cru au corps ont renié sa nature. Car il s’est incarné en une seule nature, et il a mêlé et uni l’humanité avec sa divinité, l’immortel avec le mortel, car il rendra tous les hommes indétachables de son immortelle divinité. » Or nous avons une foi, qui n’a pas été définie récemment, mais telle que nous l’avons reçue des saints apôtres par l’entremise de notre pontife saint Grégoire, qui a prêché au roi Trdat et aux chefs d’Arménie, environ trente ans avant Constantin. Et saint Lewond, le grand archevêque de Césarée, où saint Grégoire fut élevé et instruit, et qui le sacra pontife, lui aussi a établi la même tradition. Une deuxième fois, les saints et véritables pères se sont encore réunis à Nicée sur l’ordre du pieux roi Constantin, et ils ont rejeté la fureur de la secte impie et ils ont semé la véritable foi dans tout l’univers. Et notre saint Rstakês, fils de saint Grégoire, y assista et reçut du saint concile les ordres de la foi et du grand roi Constantin; il les apporta et les offrit au roi Trdat qui aimait le Christ et au saint pontife Grégoire, avec les ordres du bienheureux Constantin. Nous restons établis sur ces [données], et nous les considérons comme suffisantes dans la doctrine de la véritable foi, suivant ce qui a été dit : « Ne change pas les limites de la foi qu’établirent tes pères. »
Et encore une autre fois, lorsque le roi Trdat fit ses préparatifs et prit avec lui le saint évêque Grégoire et son fils l’évêque Rstakês, et que, avec l’escorte militaire des quatre gaherêch de son palais; et 70.000 personnes choisies parmi les principaux de toits ses Etats, il se rendit àRome pour voir Constantin. Dès qu’ils s’aperçurent, Constantin vint au-devant de saint Grégoire et s’inclina à ses pieds pour être béni par lui. Alors ils prirent pour intermédiaire la foi qui [est] en le Seigneur Jésus-Christ; et, sous serment, les deux rois s’unirent, en consolidant la paix ensemble, pour toujours, entre les deux rois; et ils ont établi pour nous la vérité de la foi, que le saint Esprit établit pour nous.
Nous ignorons les autres conciles, réunis en divers endroits, et nous considérons que ce [que j’ai énuméré] contient les fondements de la foi de ton pieux palais, du bienheureux Constantin et du concile de Nicée. Et quiconque en a davantage, quand même ce serait un ange du ciel, qu’il soit anathème! Or tous les docteurs de l’Eglise, qui ont excellé dans l’art de la philosophie et se sont initiés à la révélation divine, ayant reçu des saints apôtres le véritable fondement [de la foi] sont partis de chez vous et l’ont prêché dans l’univers tout entier. Notre saint et véridique catholicos Grégoire, élevé et instruit à Césarée de Cappadoce nous a enseigné la doctrine sur laquelle étant fondés, nous restons inébranlables jusqu’aujourd’hui; et avec lui, nous avons comme docteurs les saints pères véridiques qui tous ont parlé à Nicée : Yustianos, Dionêsios et Bektovr, évêques de Rome; Dionêsios d’Alexandrie; Pierre le témoin; Théophilos et Athanase et l’évêque Cyrille d’Alexandrie et l’évêque Basile de Césarée, et Grégoire de Nazianze, et le thaumaturge Grégoire de Néocésarée, et Grégoire de Nysse, frère de Basile, et d’autres pasteurs orthodoxes en quantité innombrable qui parlent de la même manière qu’eux, et dont l’histoire est connue.
Or comme les ennemis de la piété, en faisant invasion plusieurs fois, ont perdu notre pays, et comme les hommes ont perdu le pays, ils ont également détruit les testaments de l’Eglise et les vardapets; il n’y a plus de testaments ni de vardapets; nous ne connaissons plus notre littérature et notre culture; mais dans la mesure où est restée en divers endroits une histoire des doctrines, elle nous enseigne de cette manière la vérité de la foi qui fut proclamée à Nicée, lumière vers laquelle s’empressait d’arriver Rstakès, fils de saint Grégoire. Et ainsi fut publiée la parole du concile synodal de Nicée:
CREDO DU CONCILE DE NICÉE.
« Nous croyons en un seul Dieu, père, tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, tant des choses visibles que des invisibles; et en un Seigneur Jésus-Christ, fils de Dieu, né de Dieu le père, unique, c’est-à-dire de l’essence du Père, Dieu de Dieu, lumière de la lumière, dieu véritable du Dieu véritable, engendré et non créé, de même nature que le père, par qui tout a été [créé] au ciel et sur la terre, tant les choses visibles que les invisibles; qui, pour nous et pour notre salut, descendant [sur la terre] s’incarna, se fit homme, naquit absolument de Marie, la sainte Vierge, par le saint Esprit, et qui reçut âme, corps, esprit et tout ce qui est dans l’homme, véritablement, et non en apparence; qui fut torturé, c’est-à-dire crucifié, enseveli, et au troisième jour ressuscita, monta au ciel avec le même corps [et il s’assit à la droite du père; il viendra avec le même corps et] avec la gloire du père juger les vivants et les morts; il n’y a pas de fin à son règne. Nous croyons aussi au Saint-Esprit, non créé, parfait, qui a parlé dans la loi, dans les prophètes et dans les évangiles, qui descendit au Jourdain, prêcha par les apôtres et habita dans les saints. Nous croyons aussi à l’unique Eglise universelle, à un seul baptême, à la pénitence, à la rémission des péchés, à la résurrection des morts, au jugement éternel des âmes et des corps, au royaume des cieux et à la vie éternelle. Quant à ceux qui disent qu’il était un temps où le Fils n’existait pas, ou bien qu’il était un temps où le Saint-Esprit n’existait pas, ou qu’ils furent créés du néant, ou qui disent que le Fils de Dieu ou le Saint-Esprit sont d’une autre essence ou existence, ou variable, ou altérable, nous les anathématisons, car l’Église universelle et apostolique les anathématise.
« Et nous glorifions celui qui était avant l’éternité, en adorant la sainte Trinité et la divinité simultanée du Père, du Fils et du Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les éternités des éternités. Amen. »
Et ensuite ils furent appelés à Rome et se présentèrent devant le roi Constantin et lui enseignèrent la foi véritable et posèrent par leur témoignage le fondement de la foi.
En l’an (284) de notre Sauveur Jésus-Christ qui nous a donné la vie, Dioclétien régnait avec ses trois collègues du royaume des Romains. [Et] ils suscitèrent des persécutions contre les chrétiens, ils dévastèrent toutes les églises dans tout leur empire. Et en l’année 75e [de sa vie] mourut Constantin, et son fils Constantin régna en Gaule et en Espagne. Il livra bataille à Maximien, à Maximintos son fils, à Likianos et à Marcien; il les vainquit et les tua, car il crut en un seul Dieu, maître de tout, et en son fils Jésus-Christ. Il comprit que c’est lui qui lui avait donné la victoire, et il donna l’ordre aux chrétiens de construire des églises et de délivrer les endroits où les martyrs étaient déposés, et il combla de grands honneurs les chrétiens. Il donna l’ordre à tons les évêques de se réunir dans la ville de Nicée; les évêques et de nombreux saints se réunirent. Ils restèrent là pendant quinze jours, puis il les fit entrer dans le palais, et tandis qu’ils se tenaient réunis tous ensemble dans une salle dorée, il entra et se tint au milieu d’eux. Il fit cette profession [de foi] : Je suis chrétien et serviteur du Dieu tout puissant et de son fils bien-aimé Jésus-Christ. Et une enquête sur la foi fut faite par tous les évêques, devant le roi Constantin. Ils examinèrent les livres et écrivirent la foi véritable qui nous fut proclamée à Nicée, [foi qui a duré] depuis l’empereur Néron jusqu’au bienheureux Constantin, et de Constantin jusqu’au roi Marcien, qu’ont eue tous les docteurs, les principaux guides de l’Eglise, depuis le vaillant Théophile, le grand architecte des belles villes d’Egypte, d’Alexandrie, de Rome, de Constantinople, d’Athènes, de Cilicie, tous les docteurs de l’Eglise jusqu’aux jours de Marcien, jusqu’au tumar de Léon, de Théodoritos, chef du concile de Chalcédoine, que [Léon] a confirmé d’une manière hétérodoxe. « Et nous, nous ne devons nous glorifier qu’en la croix de notre Seigneur Jésus-Christ. » David aussi lui-même se glorifie par la croix de son fils; elle ne fut pas considérée comme un outrage à la divinité, mais le Seigneur l’a parfois appelée: Chars de Dieu, parfois: Mont Sinaï, et parfois: Hauteur du ciel. Car il dit: « Chars de Dieu par myriades, des milliers de conducteurs, et le Seigneur en eux, sur le Sinaï de sainteté. Il monta sur les hauteurs et captura les captifs »; et encore: « Chars de Dieu par myriades, des milliers de conducteurs, et le Seigneur en eux ». Car c’est par myriades de myriades que se compte la puissance et la gloire de la croix du Christ, qui porte le créateur du ciel et de la terre. Les milliers de Juifs l’ont élevé : « Et le Seigneur en eux sur le saint Sinaï. » Y aurait-il quelque espoir pour eux? Cela est évident par la puissance infiniment grande et la gloire de la croix, par laquelle il a délivré les captifs et c’est pourquoi nous n’avons honte de dire au fils de Dieu: « Saint et immortel, qui fus crucifié pour nous, aie pitié de nous ».
Quant au sacrement du Seigneur, que nous distribuons avec grande prudence, il en est de même; nous n’avons pas le pouvoir de fournir le pur aux impurs. Car nous avons les canons [renfermant] des règles et des lois universelles, pour les hommes et pour les femmes; ceux qui s’unissent étant vierges peuvent jouir sans honte du corps du Seigneur; selon ce qui a été dit : « Le mariage est honorable en tout, et le lit sans souillure. » Quant aux secondes [noces], même si l’un des conjoints est vierge et l’un seulement déjà marié, il est ordonné que tous les deux fassent pénitence durant trois ans, et ils doivent ensuite se conformer aux lois. Quant aux troisièmes et quatrièmes [noces], l’Église ne les admet pas, et n’ose même pas prononcer alors le mot de communion, selon ce qui a été dit: « Qui mange et boit avec indignité, mange et boit sa propre condamnation, car il ne discerne pas le corps du Seigneur. » Et la voix divine proteste de « ne pas donner les choses saintes aux chiens ».
Sur les tablettes de pierre aussi, il a écrit de son doigt un des dix oracles: « Ne commets pas adultère. » Mais nous voyons que, chez les anciens et chez les premiers philosophes, la fornication était considérée comme impure et répugnante. Car Solon l’Athénien a établi des lois pour les Athéniens, leur prescrivant de se tenir à l’écart de la fornication et de ne pas admettre le fils de la prostituée à l’héritage. Lycurgue le Lacédémonien ordonna aussi dans sa législation aux Lacédémoniens de se tenir à l’écart de la fornication, et même de ne pas enterrer les fils de prostituées.
On demandait à une femme nommée Thêanov, élève de Pythagore : Combien de jours après s’être approché d’une femme, est-il permis d’aller à la cour? Elle répondit: « Si c’est de sa femme, ou peut [toujours] entrer, si c’est d’une autre, on ne le peut jamais. »
Or, si ceux-là même [les païens] embrassaient de cette façon la continence, combien davantage devons-nous accomplir avec crainte la parole apostolique: « Fuyez la fornication » car bien qu’il n’y ait pas de juste, pas même un seul, il ne faut pas outrager le corps divin audacieusement. Comment la bouche impure s’approchera-t-elle? Ou bien comment le tremblement ne saisirait-il pas celui qui communie s’il approchait sans respect le feu vivant? Même avec des pinces, le prophète lui-même ne méritait pas de le goûter; mais seulement, en s’approchant de ses lèvres, il reçut la pureté.
Et maintenant, convient-il à un homme impur et souillé d’oser [se présenter] à la cour? Qui [lui] permettra d’entrer? Ou bien ne s’enfuira-il pas, chassé? surtout s’il désire goûter à la table royale; à plus forte raison, combien faut-il avoir d’audace pour entrer à la cour du roi céleste sans avoir le vêtement de pureté, pour s’approcher du feu vivant avec une insolence téméraire, pour goûter à la table royale et céleste, et pour ne pas être chassé et poussé dehors, selon ce qui a été dit: « Allez loin de moi, vous tous ouvriers d’iniquité. »
Voilà ce que nous avons reçu de saint Grégoire et des pieux rois Constantin et Trdat, et après cela, la lumière de Nicée nous a été octroyée par l’entremise du même bienheureux Constantin; nous restons fondés sur la même tradition, nous ne nous en détournons pas, ni à droite ni à gauche.
Et pour les autres conciles, comme nous l’avons dit plus haut, nous ne les connaissons pas en vérité; mais tandis que les anciens docteurs ont dénommé saint et véritable le concile qui s’est réuni à Constantinople pour condamner Nestorius, ils n’ont pas dit que le concile de Chalcédoine fût véritable, car les directeurs du concile d’Ephèse avaient l’esprit de Nestorius, mais n’osaient pas le manifester. Et quoiqu’ils aient réuni le concile [contre] l’impiété d’Eutychès, pareils à sa monstruosité, ils ont établi leur propre hétérodoxie, car Eutychès égaré disait : « Le Christ a apporté son corps du ciel. »
Le Christ qui était un, après l’union du Verbe et du corps, ils l’ont divisé en deux natures et ils ont prêté à penser que la sainte Trinité était une quaternité. Car trouvant le tumar de Léon, comme monument de leur hétérodoxie, ils ont établi leur scélératesse sur [le tumar] et ils ont dit: Le Seigneur Jésus-Christ avait deux natures, sans supprimer la différence des deux natures; pour les unir, ils ont purifié encore plus la puissance des deux natures, et unir chacune avec sa forme propre, ne pas donner à la nature divine la bassesse de la nature humaine, ni à la nature humaine la richesse de la nature divine.
[Il faut] considérer comme indigne et impossible pour Dieu de devenir homme et de naître d’une femme, d’éprouver toutes les passions humaines, d’être cloué sur la croix et de mourir.
Or, si tout cela était impossible, selon le corps, au Verbe de Dieu, il était donc impossible à la Vierge de concevoir sans homme, et de donner naissance, tout en restant immaculée, à Dieu devenu homme, et il était impossible à l’homme de nourrir les 5.000 [personnes] avec 5 pains et de changer l’eau en vin, et d’ouvrir les yeux de l’aveugle avec de la salive, de marcher sur l’eau, de chasser les démons, de ressusciter les morts, et d’autres [choses] encore. Quant à nous et à tous ceux qui confessent la vraie [foi], [nous croyons] que ce n’était pas le corps humain, mais la divinité dans le corps. Quant à ceux qui après l’union déchirent en divisant, nous les repoussons et nous les anathématisons, selon le bienheureux Cyrille d’Alexandrie, qui dit : « Si quelqu’un ne confesse pas qu’Emmanuel est Dieu en vérité, par conséquent que la Vierge
Marie, mère de Dieu, a donné naissance non seulement au corps, mais au verbe divin incarné, qu’il soit anathématisé. — « Si quelqu’un ne confesse pas que le Verbe de Dieu s’unit à la nature du corps, et que le Christ est un, Dieu avec le corps, et en même temps homme, qu’il soit anathématisé.— « Si quelqu’un divise le Christ un en deux figures, après l’union, et s’il dit qu’il n’y a que rapprochement et liaison, comme ayant trouvé la puissance avec l’honneur et la richesse, et non pas union par la nature, qu’il soit anathématisé. Et la voix du Seigneur nous proteste: « Que votre lumière luise ainsi devant les hommes », c’est-à-dire la vérité de la foi, « afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu’ils glorifient votre père qui est dans les cieux. »
Quant à nous, comme nous avons reçu les ordres de ta céleste et pieuse royauté, ô vaillant roi Constantin, nous avons préféré faire connaître par un acte à ta pieuse royauté amie de Dieu, au moyen de cette lettre, la constitution de la foi orthodoxe que nos pères ont reçue des premiers docteurs. Que Dieu accorde à notre indignité de demander la connaissance du bien et qu’il bénisse ta pieuse et bienfaisante puissance, pour que tu règnes éternellement sur le monde entier, sur mer et sur terre, toujours victorieux.