La capitale du Bambara, Sego, où j’arrivais alors, consiste proprement en 4 villes distinctes ; deux desquelles sont situées sur la rive septentrionale du fleuve et s’appellent Sego Korro et Sego Bou. Les deux autres sont sur la rive méridionale, et portent les noms de Sego Sou Korro et Sego See Koro. Toutes sont entourées de grands murs de terre. Les maisons sont construites en argile ; elles sont carrées et leurs toits sont plats ; quelques-unes ont deux étages, plusieurs sont blanchies. Outre ces bâtiments, on voit dans tous les quartiers des mosquées bâties par les Maures. Les rues, quoique étroites, sont assez larges pour tous les usages nécessaires dans un pays où les voitures à roues sont absolument inconnues. D’après toutes les notions que j’ai pu recueillir, j’ai lieu de croire que Sego contient dans sa totalité environ 30 000 habitants. Le roi de Bambara réside constamment à Sego See Koro ; il emploie un grand nombre d’esclaves à transporter les habitants d’un côté à l’autre de la rivière. Le salaire qu’ils reçoivent de ce travail, quoiqu’il ne soit que de 10 kauris par personne, fournit au roi, dans le cours d’une année, un revenu considérable. Les canots dont on fait usage ici sont d’une construction singulière ; chacun est fait avec les troncs de deux arbres joints non pas côte à côte, mais bout à bout : la jointure se trouve précisément au milieu du canot. Ils sont, par conséquent, beaucoup trop étroits pour leur longueur, et n’ont ni ponts ni mâts. Ils ne laissent pas cependant que d’avoir beaucoup de capacité. J’en ai vu traverser la rivière chargés de quatre chevaux et de plusieurs personnes.
En arrivant à ce passage, nous trouvâmes beaucoup de gens qui attendaient le moment de passer. Tous me regardaient en silence, et je vis avec inquiétude, dans le nombre, plusieurs Maures. On s’embarquait en trois endroits différents, et les passeurs étaient actifs et prompts ; mais la foule était telle que je ne pus obtenir sur-le-champ mon passage : je m’assis sur le rivage pour attendre un moment plus favorable. L’aspect de cette grande ville, ces nombreux canots qui couvraient la rivière, cette population active, les terres cultivées qui s’étendaient au loin à l’entour me présentaient un tableau d’opulence et de civilisation que je ne m’étais pas attendu à rencontrer dans le centre de l’Afrique.